French Journal For Media Research

Hassan ATIFI

La vidéo en ligne de charité : un nouveau média de mobilisation solidaire au Maroc

Résumé

Cet article présente les résultats d’une étude de la vidéo de charité en ligne comme nouvel outil de solidarité digitale au bénéfice des personnes vulnérables au Maroc. Il s’agit d’étudier ces nouveaux modes de solidarité inventés par des Marocains en détresse et diffusés dans l’espace numérique. Notre approche s’inscrit dans le champ de la communication électronique et des médias émergents. Notre méthodologie relève de la sémio-pragmatique et de l’ethnographie de la communication électronique. Nous nous intéressons aux formes et aux enjeux des mobilisations solidaires émergentes via la vidéo en ligne dans l’espace public marocain. Après une présentation du corpus, de la méthodologie et des résultats nous proposons, dans la discussion, trois pistes explicatives : économique, technique et culturelle. En conclusion, on évoquera les perspectives que nous souhaitons donner à ce travail.
Vidéo en ligne, communication électronique, médias émergents, soutien social en ligne

Abstract

This paper focuses on online charity video as a new digital solidarity tool for the benefit of vulnerable people in Morocco. Our approach falls within the field of digital communication and emerging media. Our methodology is based on the semio-pragmatic and the ethnography of digital communication. Our main reach question concerns the analysis of emerging forms and stakes of solidarity mobilizations via online video in the Moroccan public and media space. After a presentation of the corpus, of the methodology, and the main results, we will propose, in the discussion, three possible explanations: economic, technical and cultural. In conclusion, we present the future perspectives of this work.

Full text

Introduction

1Cet article présente les résultats d’une étude de la vidéo de charité en ligne comme nouveau dispositif ou média de solidarité digitale au bénéfice des personnes en situation de vulnérabilité au Maroc. Il s’agit d’étudier ces nouveaux modes de solidarités inventés et diffusés dans l’espace numérique par des Marocains en détresse. Notre approche relève du champ de la communication électronique (Herring 2004) et des médias émergents. C’est une approche résolument empirique issue de la pragmatique de la communication dans son acception anglo-saxonne notamment ethnographique (Hymes 1972).

2Notre recherche s’inscrit principalement dans ce mouvement généralisé de l’essor de l’internet et des médias sociaux transformant profondément et durablement les usages médiatiques dans le monde. Internet, par exemple, facilite les mobilisations citoyennes en introduisant dans l’espace public des questions sociales oubliées par les médias classiques (Bennet & Segerber (2011). Il permet aussi l’inclusion de nouveaux participants habituellement écartés de la participation (Wojcik, 2011). Internet, en outre, peut modifier ostensiblement les relations, le pouvoir, l’action et les médiations rendant possible un nouvel ordre social, politique et démocratique (Postzer, 2007, Cardon, 2010).

3Cette étude se situe particulièrement dans le prolongement des études sur le soutien social en ligne (Gauducheau 2011) et l’internet solidaire. En ce qui concerne le soutien social, les études académiques distinguent généralement trois types de soutien : informationnel, émotionnel et tangible. Le soutien informationnel apporte des informations, des opinions et des conseils. Le soutien émotionnel consiste dans l’apport de réconfort, d’encouragement, d’espoir, de sympathie et d’affection (Maloney- Krichmar & Preece, 2005). Le soutien tangible prend la forme d’une aide matérielle en biens ou services (Walther & Boyd, 2000).

4D’autres études ont démontré le rôle facilitateur joué par l’internet dans le renforcement des solidarités numériques. L’internet y est souvent représenté comme un formidable outil de citoyenneté, d’activisme et de mobilisation en ligne en faveur des populations marginalisées ou fragilisés. On peut citer, par exemple, le rôle joué par l’internet dans le renforcement des communautés diasporiques (Atifi 2003, Mattelart 2009), des groupes politiques (Cardon & Granjon, 2013, Mabi & Théviot, 2014), des minorités dans le domaine de la santé (Thoër, C., Levy, J.J (2012), des minorités sexuelles (J.J Lévy, J. Dumas, B. Ryan, C. Thoër 2011), des aidants de malades (Atifi & Gaglio 2012) etc.

5Ici une forme spécifique d’appel à l’aide tangible est étudiée puisque le phénomène médiatique émergent est le recours croissant par les internautes à la vidéo numérique pour sensibiliser, susciter l’empathie et déclencher l’aide matérielle en faveur des personnes en situation de précarité au Maroc. Effectivement, au Maroc, de plus en plus de personnes vulnérables filment et postent des vidéos d’elles-mêmes appelant à l’aide et aux dons.

6Ces vidéos de charité en ligne visent délibérément à mobiliser les internautes au profit des personnes en situation de vulnérabilité. Elles prolifèrent sur YouTube et sont parfois relayées par le site Hespress, premier média électronique au Maroc. Ces vidéos personnelles relèvent de ce que certains appellent les users generated content1ou users contents c’est-à-dire les contenus produits par les utilisateurs et diffusés sur les plateformes de vidéo en ligne (Scopsi et al. 2010). Après une présentation de notre corpus et méthodologie, nous allons exposer les principaux résultats de notre étude avant de proposer, dans la discussion, trois pistes pour comprendre l’essor de ce nouveau phénomène médiatique. En conclusion, on s’interrogera sur les perspectives que nous souhaitons donner à ce travail.

Corpus, méthodologie et problématique

7Le corpus analysé provient du site d’information en ligne Hespress2. C’est le quatrième site fréquenté au Maroc après Google, Facebook et Youtube mais c’est le premier média électronique dans ce pays. Cette reprise par Hespress de certaines vidéos de charité leur offre les conditions d’une audience très élargie et rend la mobilisation solidaire autour des personnes vulnérables possible. Hespress agit donc comme une caisse de résonance pour amplifier l’appel à l’aide et relier la personne vulnérable aux e-donateurs potentiels.

8On peut noter la présence de deux principales formes d’appel à la charité sur le site : la première existe sous une forme textuelle, c’est-à-dire une brève ou un article dans le fil « actualités », la seconde apparait sous une forme animée ou vidéo. Nous avons comptabilisé l’apparition de 2 à 3 vidéos par semaine et constitué un premier corpus de 50 vidéos couvrant les mois de juillet à décembre 2015. La durée de chaque vidéo peut varier de 1 à 8 minutes, avec une durée moyenne de 3 minutes. Cette diffusion hebdomadaire de deux à trois vidéos sur le site continue même aujourd’hui, en 2017, puisque nous continuons à faire de la veille et de la collecte de corpus sur le sujet.

9Après avoir étudié le fonctionnement de l’entraide en mots dans les forums diasporiques, nous nous intéressons aux nouvelles formes et enjeux du soutien tangible entre personnes vulnérables utilisant la vidéo en ligne. Notre méthodologie et questionnement relèvent de la sémio-pragmatique et de l’ethnographie de la communication électronique, c’est-à-dire de l’analyse sémiologique, pragmatique et ethnographique des communications électroniques. Nos deux principales questions de recherche sont :

10 (1) Quels sont les formes et les enjeux des vidéos en ligne ?

11- Quelles sont les principales situations de vulnérabilités mises en visibilité ? Qui appelle à l’aide ? Et à qui s’adresse l’appel ?

12- Quelles stratégies socio-communicationnelles sont mises en œuvre pour susciter l’empathie et l’aide des e-donateurs ?

13(2) Comment expliquer cet essor de la vidéo de charité en ligne au Maroc ? Et que révèle ce phénomène des évolutions ou des mutations des solidarités traditionnelles (familiales) au Maroc et d’évolution d’accès à l’espace public ?

14Avant de développer les premières observations et résultats de notre étude, nous allons situer ce phénomène émergent dans un mouvement plus large du développement du web 2.0 notamment en lien avec l’essor de la vidéo en ligne et la philanthropie numérique.

Dans quel cadre inscrire ce phénomène émergent ?

Essor de la vidéo sur Internet 

15La vidéo en ligne n’est pas seulement un média de consommation, comme les médias classiques (télévision, radio, presse) mais aussi et de plus en plus un média de production. Elle participe de l’accroissement de la participation des individus ordinaires dans la sphère publique (médiatique et communicationnelle) jadis réservée aux personnalités et experts ratifiés par les instituions médiatiques (Bernier 2015). Certains, comme David Lacombled, Président de l’IAB3 , L’Interactive Advertising Bureau, la qualifient même d’un nouveau média de masse.

16Depuis le lancement des plateformes d’hébergement de vidéos YouTube et Dailymotion en 2005, l’utilisation de la vidéo sur Internet s’est généralisée. Cet essor s’inscrit dans le phénomène « Web 2.0 » qui consacre les Users Generated Content, ces contenus produits par les internautes eux-mêmes qui lancent de nouvelles pratiques, formats ou genres numériques et définissent ainsi des tendances que les professionnels s’approprient par la suite puisqu’ on a vu apparaitre progressivement, des vidéos professionnelles aux côtés des UGC.

17Ces vidéos amateurs produites par les internautes consacrent le succès du célèbre commandement et slogan publicitaire de YouTube  « Broadcast Yourself » qui propose un dispositif de communication universel aux individus du monde entier dédié à la diffusion de leurs propres vidéos personnelles pour dévoiler leur talent,  témoigner de leur quotidien ou défendre une cause (Bouillot Charlotte, 2016). Ces vidéos personnelles peuvent rencontrer une forte audience et contribuent grandement au succès et à la notoriété des plateformes d’hébergement.

18Certains auteurs évoquent même une hégémonie des contenus vidéo sur Internet. Selon Michaël Bourgatte4, la vidéo numérique occupe une place centrale sur le réseau Internet. D’après une étude menée par la banque d’images Shutterstock et menée conjointement avec comScore, la vidéo représente 60% du trafic web mondial. En 2015. L’étude avance plusieurs chiffres pour appuyer cette tendance : Youtube et Netflix représentent 50 % du trafic web aux USA. YouTube est le troisième site le plus visité au Monde, en France et au Maroc et chaque jour, 4 milliards de vidéos sont vues sur le site. En France, près de 90 % du flux est de la vidéo et 85% des internautes. En moyenne, un Français a regardé 190 vidéos au mois de janvier 2014 (plus de 16 heures).

19Par ailleurs, intégrer un lien vidéo dans un email augmenterait de 96% la probabilité que l’email soit lu. Aussi, il semble préférable, quand on cherche un nom sur Internet, de cliquer sur une vidéo plutôt que de lire des documents textuels puisqu’ il y a deux fois plus de chances qu’on regarde une vidéo. En outre, une vidéo sur 6 est visionnée sur un équipement mobile, smartphone ou tablette. De plus, 36% des vidéos regardées sur Internet sont des publicités. Enfin, les dépenses en vidéos publicitaires vont encore doubler en 2 ans.

20L’essor florissant de la video en ligne est renforcé par l’apparition de plusieurs applications, dont Vine, qui permet aux intenautes de capturer des videos, de les travailler et de les partager facilement sur les résaux sociaux. Après le succès des vidéos amateurs, humoristiques ou insolites, l’inventivité et la créativité des internautes ne cessent de surprendre les observateurs de ces pratiques médiatiques numériques émergentes. Par exemple, le journal Le Monde évoque, dans son édition du 18 février 2017, le succès des « videos grocery hauls »5. Ce phénomène né aux USA consisteà fairele grand déballage de ses courses de supermarché. Ici youtubeuses et youtubeurs exposent et mettent en valeur leurs achats ou butins alimentaires de la semaine ou du mois. Ces vidéos rencontrent de très belles audiences et sont vues plusieurs dizaines de milliers de fois.

Usages des vidéonautes et typologie des vidéos en ligne

21Pour Gervais Jean-François et al. (2010)YouTube ne se présente pas seulement comme un simple catalogue ou stock de vidéos à visionner mais comme un réseau ou média social d’expression et de socialisation comme Facebook par exemple. Les auteurs citent Michael Wesch, spécialiste de l’ ethnographie numérique de YouTube, pour qui 61 % des vidéonautes, c’est à dire des personnes qui consomment de la vidéo sur Internet, utilisent YouTube comme réseau social (« to connect with others or to be social ») ; 43 % pour s’amuser (« for fun or entertainment») ; 41 % simplement pour voir des vidéos (« simply like watching YouTube ») ; 33 % pour exprimer une opinion (« to express their opinions ») ; 25 % pour exprimer leur créativité (« to be creative »). Les auteurs ajoutent que la vidéo fonctionne comme un « usage d’appel » menant à des interactions nombreuses via les « commentaires » qui expriment un avis ou délivrent une information à la suite de la vidéo et établissent parfois de véritables conversations entre internautes comme sur un forum. Les « conversations » peuvent aussi être des vidéos se parlant mutuellement.

22Selon la dernière enquête Médiamétrie (2016), 70% des internautes français regardent de la vidéo sur un écran numérique au moins une fois par mois et 37% tous les jours ou presque. Cette forte consommation est favorisée par l’accroissement d’équipement des foyers en écrans numériques. En effet, 35,8% des foyers français sont aujourd’hui équipés des 4 écrans (TV, Ordinateur, Mobile & Tablette). Toujours selon Médiamétrie, l’usage de la vidéo est devenu natif chez les 15-24 ans : 95% d’entre eux consomment de la vidéo au moins une fois par mois ; mais il touche néanmoins l’ensemble de la population, 71% des 25-49 ans en consomment et 54% des 65 ans et plus.

23Dans la vidéo en ligne, l’utile, le sérieux et l’instructif côtoient le futile, l’insolite et le récréatif. On est tenté de penser que le futile l’emporte largement sur l’utile. Les vidéos insolites d’animaux de compagnie par exemple ont fait le succès des plateformes de vidéos. La vidéo en ligne peut servir plusieurs usages : divertir, instruire, informer ou même apprendre : tutoriels de bricolage, recette de cuisine, de maquillage, etc. Globalement on peut distinguer plusieurs types de vidéo en ligne : information, divertissement, apprentissage, expression, mobilisation etc.

24Michaeël Bourgatte (2015) évoque par exemple l’explosion de la vidéo pédagogique, depuis l’avènement de la Khan Académy, sous formes de tutoriels, de cours en ligne, de conférences et des MOOCs. Elle sert aussi à faire de la publicité pour les entreprises pour qui elle représente un outil incontournable de relation avec les clients selon les spécialités du marketing : 74 % du trafic internet comportera de la vidéo en ligne en 2017 et la vidéo publicitaire va devenir aussi importante que la télévision dans les 5 années à venir. En outre, 51,9 % des professionnels dans le monde citent la vidéo comme le média avec le meilleur retour sur investissement6 .

25Pour Thierry Devars (2017) de nouveaux Youtubeurs renouvellent la communication politique en proposant des formes nouvelles d’expression audio-visuelles : vidéos pamphlétaires, vidéos satiriques ou parodiques, vidéos amateurs de fact-checking politique, vidéos d’analyses et de réflexions. Et après les Youtubeurs qui ont investi le champ de la communication politique en ligne, c’est au tour des politiques de faire de la vidéo. Ainsi, sans doute en voulant imiter Jean-Luc Mélenchon, premier Youtubeur politique français en nombre d'abonnés (plus de 160 000) sur sa chaîne personnelle, Florian Philippon, vice-président du Front national, a lancé sa chaine YouTube. La motivation principale avancée par les politiques pour expliquer cette préférence pour la vidéo en ligne est la volonté affichée de contourner et de s’affranchir des médias classiques en s’adressant directement aux citoyens. Parmi les usages dominants de la vidéo en ligne, on peut noter aussi l’explosion de l’affichage de soi sur internet. Selon Bernier Guylain (2015), de plus en plus de personnes rendent visible leurs singularité, talent, aptitude, prestations, prouesses et différence.

L’essor de la vidéo en ligne au Maroc

26L’essor de la vidéo en ligne est observé aussi au Maroc et correspond à des usages multiples. On peut distinguer schématiquement les vidéos professionnelles et amateurs ou personnelles. Si on esquisse une première typologie des vidéos en ligne au Maroc, on peut noter l’existence de plusieurs types de vidéos : de dénonciation, de mobilisation, de témoignage, de célébration, de promotion, de délation.

27Dans les vidéos de dénonciation ou d’alerte les internautes dénoncent les abus en tout genre, les violences policières contre des manifestants, des conditions de vie difficiles dans les bidonvilles, l’accueil déplorable des malades dans les hôpitaux, des agressions ou des faits de corruptions etc. L’un des premiers succès de la vidéo en ligne au Maroc concerne la dénonciation des faits de corruption. On doit ces premières vidéos au célèbre "sniper de Targuist"7 qui filmait et diffusait anonymement depuis 2007 des vidéos de fonctionnaires pris en flagrant délit de corruption avant de révéler son identité en 2013. En effet, le Maroc est situé par Transparency International comme pays à un niveau « élevé » dans l’échelle de corruption dans le monde. Pour enrayer ce fléau le gouvernement a dépénalisé cette pratique de dénonciation des faits de corruption. C’est pourquoi, de plus en plus d’actes de corruption sont révélés grâce à des citoyens armés d'une caméra vidéo ou d’un smartphone8. Ainsi, sur YouTube circulent plusieurs vidéos de policiers, gendarmes ou fonctionnaires en flagrant délit de corruption9.

28En ce qui concerne les vidéos de mobilisation, il y a eu dans le sillage du printemps arabe, à partir de 2011, une floraison de vidéos politiques individuelles ou collectives de contestation, de mobilisation en faveur de plus de liberté et de démocratie au Maroc. YouTube regorge de vidéos politiques de personnes anonymes ou de personnalités de la société civile vivant au Maroc ou à l’étranger. On peut citer, par exemple, dans sa première vidéo Sans Maquillage, diffusée sur YouTube le 4 septembre 2016, l'actrice marocaine Loubna Abidar violemment critiquée au Maroc pour avoir incarné une prostituée dans le film Much Loved et exilée en France depuis, dénonce sans détour le système politique marocain, notamment les dernières élections législatives d’octobre 2016.

29Dans la vidéo de témoignage l’internaute est témoin d’un évènement qu’il se charge de filmer et de partager auprès du grand public sur les réseaux sociaux et les plateformes vidéo : un incendie, une catastrophe naturelle ou industrielle, accident de la route, effondrement d’immeuble, funérailles d’une personnalité, etc. En 2016, la vidéo atroce de la mort d’un marchand de poisson Mouhcine Fikri écrasé par un camion benne à Al-Hoceima, une ville au Nord du Maroc, a fait le Buzz sur Internet et dans le Monde. D’ailleurs les grands médias traditionnels ou les chaines d’information en continue n’hésitent plus, aux USA et en Europe, à avoir recours à ce journalisme partitif en sollicitant le grand public des internautes pour les fournir en vidéos de témoignage10 qui sont parfois diffusées sur les écrans de télévision comme lors des derniers attentats de juillet 2016 à Nice en France.

30Dans les vidéos de promotion, des Marocains en voyage au Maroc ou dans le monde postent des courtes vidéos de type « carte postale » de leur voyage. Les vidéos de célébration montrent, par exemple, la joie collective des supportes marocains sortis massivement dans la rue après la qualification de l’équipe nationale de foot aux quarts de finale de la coupe d’Afrique des nations en février 2016. Enfin, en ce qui concerne les vidéos de délation, on peut citer celles qui dévoilent l’intimité d’anonymes ou de certaines célébrités marocaines ou d’un ministre filmé à son insu dans une discothèque.

L’Internet solidaire et la philanthropie numérique 

31L’internet solidaire recouvre plusieurs acceptions. Il peut être utilisé sous le vocable « solidarités numériques » qui englobent à la fois la réduction de la fracture numérique ou la politique institutionnelle d’inclusion sociale des publics en difficultés ou en situation de handicap. L’internet solidaire renvoie aussi au phénomène de « philanthropie numérique 11», très courant aux USA et qui a progressé après les attentats du 11 septembre 2001, par exemple après la fusillade du Colorado (2012), l’ouragan Sandy (2012) et les attentats de Boston (2013). En même temps, 80 millions d’Américains ne sont pas ou peu couverts par une assurance maladie. Cette situation représente un terrain fertile pour le développement du « crowdfunding » caritatif. Plusieurs plateformes proposent de financer l’action sociale par le crowdfunding médical. Ainsi on peut citer GoFundMe pour des actions charitables proposées par des organismes humanitaires et des particuliers et CrowdfundHealth.org pour des traitements médicaux destinés à des populations ciblées.

32En France, selon le baromètre du crowdfunding12 le marché des financements participatifs progresse et atteint 400 millions en 2015. Cependant, les Français préfèrent prêter (le (crowlending) que donner. Ils choisissent plutôt les médias classiques que les médias numériques pour financer les grandes causes humanitaires (Téléthon, Sidaction etc.). Ainsi, le don classique pèse 4 milliards et les dons en ligne ne représentent que 7,2 % du total des dons. Mais on peut noter que le crowdfundig humanitaire démarre avec des initiatives pour la recherche médicale (PasteurDON), une forte mobilisation pour Charlie Hebdo après les attentats du 7 janvier 2015 et la mise en place de plus en plus de cagnottes en ligne pour venir en aide matérielle aux proches des victimes des attentats en France.

33La solidarité s’est organisée rapidement sur Twitter par exemple après les attentats de 2015 en France avec les hastags #PorteOuverte, #RechercheParis, #PrayForParis, Mercier A. (2015). Des collectes organisées au profit des victimes où figurent souvent la photo du disparu, accompagnée d’un portrait en quelques lignes surtout sur Le pot commun ou Leetchi.com , la plate-forme la plus connue comme dans les deux exemples ci-dessous de la page « Pour Misha » victime des attentats du Bataclan, en novembre 2016 et la cagnotte du « petit Yanis » retrouvé mort, en février 2017, à cause d'une punition ultra-violente donnée par son beau-père.

Pour Misha

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Le petit Yanis

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34L’internet solidaire continue à se développer et intéresse les grandes compagnies du Web. Ainsi, après le « safety check », crée en 2014, qui permet aux utilisateurs de Facebook d’indiquer à leurs contacts qu’ils sont en sécurité pendant une crise, l’entreprise lance en février 2017, « community help », une fonctionnalité permettant aux internautes de proposer ou rechercher de l’aide. Il s’agit d’un outil d’entraide communautaire permettant aux 1.8 milliards d’utilisateurs du réseau social, de proposer leurs services aux personnes qui cherchent de l'aide en cas de crise, attentat ou catastrophe. Concrètement, quand le safety check est déclenché dans leur zone géographique, les utilisateurs pourront chercher ou proposer de l’aide : hébergement, transport, nourriture, mais aussi eau potable, affaires pour bébés ou même pour animaux13 … Facebook centralisera et listera les personnes proches géographiquement et offrant ce type d’aide, que le demandeur pourra contacter directement.

35La collecte de dons sur internet est encore un phénomène marginal au Maroc et le fundrising ou financement participatif reste donc très encadré par les autorités au Maroc. En effet, la législation en vigueur dans le pays limite drastiquement son développement. Il n’est pas possible pour une plateforme ni pour un porteur de projet de réaliser un appel public au don sans respecter des règles très strictes. Concrètement, tout projet doit être préalablement validé par le Secrétariat Général du Gouvernement. Cette étape est loin d’être une simple formalité puisque avant tout appel aux dons publics, la loi marocaine exige des associations, et non pas des individus, une autorisation préalable du Secrétariat général du gouvernement sauf dans trois cas : la construction et réparation des mosquées, le cas des institutions nationales de coopération et le troisième cas concerne les fondations reconnues d'utilité publique autorisées une seule fois par an à procéder à une seule collecte publique de dons.

36Au Maroc, le phénomène du crowdfundig reste donc très peu développé malgré quelques tentatives récentes vues sur le site.cotizi.com. On peut citer, par exemple, la campagne de solidarité digitale d’aide aux populations sinistrées par les intempéries au sud du Maroc14. Ainsi fin 2014, une première mobilisation citoyenne avait permis de réunir plus de 480.000 dirhams en trois jours (près de 45.000 euros) pour les victimes d'une inondation. Cependant plusieurs campagnes de mobilisations en faveur des démunis marocains ont vu le jour ces dernières années sur les réseaux sociaux.

37Sur Facebook, l’histoire de Mohamed, en séjour à Bruxelles, avait ému beaucoup de Marocains en 2015. 30.000 euros devaient être rassemblés pour le sauver en lui permettant d’être opéré du cœur. Un élan de générosité s’était alors mis en route. Auquel s’est joint le roi du Maroc, Mohammed VI, qui a pris une partie de l’intervention en charge.

Sauvez Mohammed sur Facebook

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38Ce cas illustre parfaitement la dimension solidariste de la société marocaine et l’engagement des Marocains du Monde au profit de leurs compatriotes. En abolissant les distances géographiques, l’internet facilite aux MRE (Marocains résidant à l’étranger) d’être plus proches de leur pays d’origine. Ainsi, nombreux sont ceux qui sont prêts à venir en aide à des familles ou personnes démunies au Maroc.

39Sur Twitter, après la campagne de mobilisation lancée par de nombreux internautes en 2014 contre le phénomène "tcharmil" qui désigne les nombreuses agressions subies par des citoyens dans différentes villes marocaines, une nouvelle campagne de mobilisation voit le jour en 2016 pour réclamer une sécurité totale. Avec le hashtag #Zéro_grissage15, en écho à la campagne gouvernementale #ZéroMika pour l’interdiction des sacs plastiques, le mot « grissage » signifiant "agression physique" en arabe marocain (darija), les internautes font appel non seulement aux autorités mais au roi Mohammed VI en personne. De nombreuses pages Facebook ont également été créées dans ce sens.

40Ce qui est vraiment émergent, innovant et que nous proposons d’étudier ici, est l’essor de la vidéo de charité numérique au profit des personnes vulnérables.

Résultats

41Au Maroc, crise économique, pauvreté, affaiblissement de la générosité familiale et surtout, défaillance de la prise en charge par l’Etat, obligent les personnes vulnérables à capter de nouvelles générosités permises par Internet. Par ailleurs,comme le fundraising reste très marginal, la vidéo de charité numérique personnelle représente un nouvel outil de mobilisation solidaire extraordinaire. En peu de temps, il est possible d'alerter les réseaux sociaux, l’opinion publique et les médias à une échelle globale, dépassant les seules frontières nationales. Au prix d'investissements limités et d’une technologie abordable, l’appel à l’aide d’une personne, d’un proche ou d’une association, peut ainsi être démultipliée et toucher par exemple tous les Marocains de la diaspora. Ainsi, les internautes vulnérables ou les aidants innovent sans cesse dans leur quête de création de communautés de soutiens au profit de personnes vulnérables.

Les situations de vulnérabilité

42Un premier examen des vidéos nous a permis d’esquisser une première typologie des situations de vulnérabilité et des profils des personnes postant des vidéos en ligne. On y voit essentiellement des malades, des proches d’enfants et d’adultes malades ou handicapés (déficience physique ou mentale), des mal-logés, des démunis et des victimes de diverses injustices : judiciaires, expropriations immobilières, violence domestique, abus sexuels, catastrophes naturelles, etc.

43A travers la mise en visibilité de la détresse des plus fragiles, ces vidéos montrent quelques maux de la société marocaine actuelle. Elles montrent l’extrême pauvreté d’une large partie de la population, l’absence de sécurité sociale pour tous, le manque d’une réelle indemnisation du chômage, la prise en compte insuffisante du handicap et le mal logement, comme dans les 3 exemples suivants :

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44Des vidéos d’appel à l’aide d’enfants maroco-syriens fuyant le conflit et demandant l’asile au Maroc ont récemment le fait le buzz sur le web marocain. Rasha Ayman Koujan (exemple 4) implore sur YouTube « Baba » Mohammed VI de lui accorder le droit d’entrée au Maroc « son pays ». Cet appel de Rasha, née du mariage mixte d’un père syrien et d’une mère marocaine, a été entendu favorablement par le ministère des affaires étrangères marocain qui a pris la décision, pour des raisons humanitaires et à titre exceptionnel de lui accorder le droit d’accéder au territoire national. L’appel direct au roi peut représenter le recours ultime pour beaucoup de Marocains ou certains MRE victimes d’expropriation immobilières comme dans les exemples 1 et 6 plus haut.

45Contrairement aux médias classiques, surtout la télévision, encore très largement contrôlée par l’Etat, ces vidéos en ligne permettent une plus grande visibilité dans l’espace public marocain aux personnes vulnérables. En effet, ces vidéos témoignent du bouleversement en cours dans le paysage médiatique marocain. Les médias classiques, surtout la télévision restent très encadrés et ne permettent l’accès de l’espace public qu’à une minorité ratifiée et autorisée : politiques, journalistes, experts, institutionnels, etc. le développement des réseaux socio numériques et les nouvelles formes de communication en ligne (réseaux sociaux, vidéo en ligne…) changent substantiellement la donne en permettant à chaque acteur de contourner les médias classiques en s’adressant à tous.

46En toute logique, ces personnes qui ont épuisé les ressources familiales proches ont besoin de solidarités communautaires élargies capables de les secourir. Ainsi, la vidéo en ligne permet d’agrandir le cadre du don classique, occupé par la famille et proches aux nombreux e-donateurs potentiels.

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47L’initiative « Sauvez Mohamed »  a vu des milliers de Marocains s’organiser dans grand élan de générosité et montre la dimension sociale et communautaire du don qui est aussi, d’un point de vue sociologique, une manifestation de l’engagement public des individus dans une entité collective, comme une participation réglée ou une solidarité due à la cohésion d’un groupe (Dessignes Catherine, 2008). D’ailleurs, l’engagement solidaire initié par des citoyens au profit d’autres agit comme un levier forçant les politiques marocains à participer également. En effet, cette nouvelle capacité de réaction, d’organisation et de mobilisation des citoyens ordinaires montre l’échec de certains responsables politiques à prendre en charge efficacement les problèmes des citoyens marocains. C’est pourquoi, on voit de plus en plus de Marocains déçus par l’inefficacité de l’administration marocaine se tourner publiquement vers le Roi et lui demander de l’aide.

48Les réponses royales (positives) alimentent l’image de proximité et de générosité du « Roi des pauvres », proche de son peuple. Mais paradoxalement cette intervention royale, toujours médiatisée, appréciée et saluée par les Marocains, souligne encore plus les défaillances du gouvernement et renforce l’idée bien répandue au Maroc du Roi comme dernier recours et porte de salut. L’appel au Roi souligne donc la défiance des Marocains envers les autres pouvoirs exécutifs et législatifs. D’ailleurs, le Roi lui-même s’en est ému dans une récente allocution devant le parlement, le 14 octobre 2016, en pointant les défaillances des responsables politiques et de l’administration marocaine. Dans son discours, le Roi critique vivement le peu d’efficience de l’administration marocaine en matière de gestion des doléances des citoyens qui préfèrent s’adresser directement à lui :

49« Je suis évidemment fier de traiter directement avec mon peuple et de régler ses problèmes simples. Je continuerai à le faire, toujours à son service. Mais est-ce que les citoyens me demanderaient d’intervenir si l’Administration faisait son devoir ? … Il est certain qu’ils y ont recours précisément parce qu’ils se trouvent face à des portes fermées ou parce que l’Administration fait preuve de négligence dans les prestations qu’elle leur fournit, ou encore pour se plaindre d’une injustice qu’ils ont subie ».

La vulnérabilité liée à la santé

50La situation de vulnérabilité la plus médiatisée est liée aux problèmes de santé. La vulnérabilité liée à la santé est omniprésente (8 cas sur 10) : maladies chroniques ou graves (cancer, insuffisance rénale, greffe du foie, maladies cardiaques, diabète etc.), des opérations chirurgicales nécessitant des soins onéreux au Maroc ou à l’étranger, des situations d’handicap (physique, mental), des malformations et séquelles liées à des accidents de la circulation et les difficultés matérielles aggravées par l'état de santé (soins, transport, subsistance, logement, soutien de famille, etc.). Les besoins exprimés par les demandeurs concernent essentiellement l’aide matérielle et financière pour faire face à la maladie, aux coûts exorbitants de certaines opérations médicales, aux besoins d’argent pour payer le transport ou tout simplement pour manger et loger leurs enfants.

51Le logement (1 cas sur 10) concerne la recherche d’un logement décent pour des personnes ou des familles très démunies (montrer et dénoncer la vétusté et l’habitat insalubre, etc.) ou montrer des Marocains victimes d’escroqueries immobilières comme des MRE (Marocains résidents à l’étranger). Dans les autres cas, (1/10), il s’agit de vidéos de réfugiés (enfants Maroco-Syriens) qui interpellent directement le Roi Mohamed 6 afin d’avoir le droit d’être accueillis au Maroc et échapper ainsi à la guerre en Syrie.

Demandeurs et e-donateurs

52Ici la parole individuelle de la personne vulnérable est mise en avant. Le récit de la vulnérabilité et l’appel à l’aide est pris en charge par la personne elle-même à la première personne. On peut parler d’auto-exposition avec un témoignage à visage découvert de la personne malade ou handicapée filmée souvent chez elle (exemple 7). Autrement dit, la vidéo valorise le témoignage personnel face caméra le plus souvent en darija, arabe marocain.

53Parfois, c’est un proche (entourage) qui se fait porte-parole de la personne vulnérable (exmple 8): un membre de la famille ; le conjoint ; la maman pour son enfant ; des enfants pour leur parents ; un proche pour son frère, sa sœur etc. Dans d’autres cas, le témoignage personnel est complété ou remplacé par une parole déléguée à un tiers. Ce tiers, souvent un membre d’une association caritative se charge de médiatiser la détresse des personnes vulnérables en interpelant directement les internautes (exemple 9). Ceci montre la forte implication de certaines associations caritatives surtout religieuses dans le terrain social.

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54En ce qui concerne le destinataire principal des demandes d’aide, on note que les personnes vulnérables veulent toucher en priorité les bienfaiteurs. En effet, la figure principale adressée par les demandeurs d’aide comme cible de la communication est le bienfaiteur (almuhsin en arabe). Dans l’exemple 14, les vidéonautes, incapables d’aider matériellement les demandeurs, sont invités à les aider moralement en partageant la vidéo pour permettre aux bienfaiteurs d’apporter l’aide en question.

55On s’adresse à l’internaute en tant que membre de la « Oumma », communauté des croyants, interpellé du point de vue de ses obligations morales et surtout religieuses. Effectivement les vidéos d’appel à la solidarité et leurs commentaires s’appuient ouvertement et principalement sur des principes ou arguments religieux : versets du Coran ou Hadits (paroles) du prophète comme dans la capture d’écran de l’exemple 15 et importance de la sadaqa (charité) dans l’exemple 16 :

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15 capture écran « hadit » (parole) du prophète16.

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Notre traduction : Nous espérons que les bienfaiteurs se montreront généreux avec cette mère en lui donnant une partie ce que Dieu leur a donné et légué. La sadaqa ne diminue pas la richesse ... et éteint la colère de Dieu ... et une sadaqa discrète vous place sous le Trône de Dieu le Jour de la Résurrection ...

Entre effet du réel et mise en scène

56Toutes les situations de vulnérabilité décrites dans les vidéos étudiées sont réelles. Aucun cas de supercherie n’a été signalé sur le site ou dans les cas analysés. Plusieurs garanties viennent authentifier la véracité des cas présentés : témoignages à visage découvert des personnes (exemple 17), le dévoiement de l’identité réelle des personnes avec leurs noms et prénoms, leurs adresses postales, le numéro de leur carte nationale d’identité, l’indication du RIB (exemple 18), les photocopies des ordonnances médicales et de l’arrière-plan authentifiant ou caution du site Hespress (exemple 19).

57Mais cette réalité bien dramatique est néanmoins mise en scène, retravaillée et construite pour émouvoir les internautes et susciter ainsi leur aide.

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58En effet, les vidéos sont diffusées intentionnellement pour impliquer, toucher et secouer l’opinion publique marocaine en particulier et les internautes en général. Ils fonctionnent, selon Cosnier (1994), à la fois comme des producteurs d’émotions et comme des inducteurs de comportement (faire impression sur autrui). Autrement dit, l’objectif de ce “ récit de la vulnérabilité” est de montrer des images-chocs, de repérer des émotions, de les raconter et de chercher à les faire éprouver par les téléspectateurs. Ceci est possible grâce au postulat empathique17.D’une certaine manière ces vidéos s’apparentent plus aux campagnes de publicités humanitaires qu’aux reportages d’information (Ungerer 1997). Certaines, tournées comme de petits reportages, bénéficient d’une réalisation de qualité professionnelle en termes de lumière, filmage, de montage et de bande son (exemple 20).

59Dans tous les cas, les vidéos sont clairement mises en scène pour déclencher l’empathie des é-donateurs. Le contexte, le son, le filmage, le cadrage, la musique, la langue de témoignage, le récit… sont des indicateurs de la situation extrême de vulnérabilité, de solitude et de détresse des personnes. Les vidéos montrent essentiellement les personnes et leurs souffrances physiques, psychologiques et matérielles. La vidéo montre les lieux de vie, les images fortes de la maladie, parfois des images insoutenables de corps squelettiques ou abimés par la maladie (21), de personnes handicapées incapables de se mouvoir, de personnes agonisantes, de personnes seules au mieux des détritus etc. Parfois, la menace de mort imminente est imposée de manière directe au regard de : X est agonisant. Ainsi seul le recours à l’aide des bienfaiteurs peut éviter de transformer cette mort probable en mort certaine.

60On montre aussi le logement et les conditions de vie difficiles de ces personnes. Les lieux filmés sont généralement exigus, vétustes et attestent de la pauvreté, du dénuement de ces personnes. Il y a une forte présence des enfants dans ces vidéos en tant que victimes ou proches de victimes malades (exemple 22). Plusieurs patients sont des soutiens de familles qui témoignent de leur vulnérabilité en présence d’un ou plusieurs de leurs enfants et réclament qu’on les aide aussi à s’occuper de leurs enfants. Le témoignage face caméra, entrecoupé par des larmes, de la personne vulnérable des images en gros plan sur les visages (Nel N., (1990), en pleurs (exemple 23), ou un commentaire en off insiste sur un ton grave voire dramatique sur la gravité et l'urgence de la situation de vulnérabilité : « elle a besoin de vous aujourd’hui pas demain ».

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Discussion

61Pour comprendre l’essor de ce phénomène émergent de la vidéo de charité en ligne comme nouveau média de mobilisation solidaire entre Marocains, nous avançons trois explications mutuellement complémentaires : socio-économique, technique et culturelle.

62Le rôle du facteur socio-économique

63L’essor des vidéos en ligne s’explique particulièrement par la faiblesse de la protection sociale au Maroc. En effet, l’essentiel des dépenses de santé est supporté par les ménages, la famille et les proches. En même temps, la famille, l’Etat, la société civile sont largement dépassés par l’ampleur des difficultés économiques engendrées, ponctuellement ou durablement, par la maladie.

64Encore aujourd’hui, la sécurité sociale marocaine n’offre qu’une protection sociale restreinte laissant une large partie de la population à la marge. La couverture sociale universelle n’est pas une réalité malgré les progrès réels enregistrés depuis la dernière décennie. Deux systèmes de protection sociale coexistent mais ne couvrent pas encore tous les Marocains. L’AMO, assistance médicale obligatoire, depuis 2005 ne concerne que 30% de la population avec les ayants-droits. Le RAMED (régime d’assistance médicale aux personnes économiquement démunies), lancé en 2011 et généralisé en 2013 vise une couverture médicale à 28% de la population, soit 8,5 millions. Par ailleurs, depuis, 2005, le Maroc a engagé une large initiative nationale pour le développement humain (INDH) et de lutte contre la pauvreté, l’exclusion sociale et la précarité dans les milieux rural et urbain18.

65Cette situation socioéconomique de crise au Maroc qui pousse les personnes vulnérables à imaginer de nouvelles formes de solidarités et de financement peut être rapprochée de ces voisins Maghrébins. En effet, en Tunisie, face à un Etat qui tend à se désengager de la gestion du social, on observe une reprise du lien social dans les communautés, les réseaux (Youssef Ben Romdane) et les associations (Moncef Guebsi)19.

66Ainsi, malgré les progrès réels enregistrés dans les dernières années dans le domaine de la prise en charge de la maladie et salués par les instances internationales, par exemple, avec l’instauration du RAMED, ces vidéos en ligne, pointent la réalité dramatique vécue par des millions de Marocains contraints de solliciter la charité en ligne de leur compatriotes et des internautes pour se soigner, survivre et subsister.

Le rôle du dispositif technique

67Cet essor de la vidéo numérique de la charité est facilité par le rôle du dispositif dans un contexte de démocratisation de l’internet au Maroc. Le Maroc est le pays le plus connecté du Maghreb, (27e pays le plus connecté du monde). Aussi le taux de pénétration d’Internet dans les foyers est de 60 % et le pays compte 20 millions d'internautes et 44 millions de comptes mobiles20. Dans ce contexte d’appropriation des technologies numériques toute personne vulnérable peut poster une vidéo de demande d’aide. Demandeur et e-donateur se sont largement rapprochés grâce à la vidéo de charité numérique. La personne vulnérable peut bien plus facilement qu’avec le face à face, la presse ou les médias classiques impliquer le bienfaiteur et lui permettre d’accomplir une action charitable. Parfois, ce rôle est dévolu aux associations qui mettent en visibilité la vulnérabilité des plus faibles. Ainsi, ces vidéos permettent un contact plus direct, plus rapide et plus large, que le premier cercle de la famille et proche entourage, même pour les personnes pas ou peu connectées à l’internet.

68Il faut noter que la vidéo de charité en ligne interindividuelle semble efficace pour l’obtention des dons. Elle devient un des vecteurs opérants des solidarités numériques entre Marocains. Plusieurs personnes vulnérables obtiennent de l’aide tangible rapidement. Touchés par la détresse des personnes filmées certains internautes proposent logement, argent, prise en charge des frais médicaux aux personnes filmées. Par exemple, suite à la mobilisation des internautes, Fouzia, jeune handicapée qui a accouché après avoir été agressée sexuellement par un membre de sa famille, s’est vue offrir un logement par un grand groupe immobilier comme le rapporte l journal électronique Telquel21. Autre exemple, la vidéo de la petite Hassna (exemple 3), relayée par le site Hespress a suscité un grand élan de solidarité et lui a permis de bénéficier d’une transplantation hépatique dans un délai record. Dans ces cas, les personnes vulnérables, les proches ou les personnes à l’initiative des demandes de solidarité postent parfois des vidéos de remerciement aux bienfaiteurs.

Le rôle du fait culturel

69Au Maroc, société plus solidariste que les sociétés occidentales, la charité ou philanthropie envers les pauvres est encore très valorisée dans le système des valeurs et la vie quotidienne des Marocains. Contrairement aux sociétés individualistes, dans  les  sociétés  “solidaristes”  le système des obligations morales est défini  de façon à ce  que  les  actes  d’entraide mutuels apparaissent  comme  absolument  “naturels” (Kerbrat-Orechioni C., 1994). Par exemple, la « sadaqa » ou générosité des bienfaiteurs au profit des plus démunis est à la fois un devoir et un des piliers de cette société arabo-musulmane22. C’est pourquoi, la figure très ancienne, religieuse et communautaire du bienfaiteur ou âme charitable est central dans ce dispositif.

70Par ailleurs, la famille est le premier pourvoyeur de solidarité envers ces membres. Mais, il est évident que la prise en charge étatique, institutionnelle ou familiale de la vulnérabilité est très insuffisante puisque la famille premier pouvoir de solidarité semble dépassée par la très grande charge matérielle induite par les maladies chroniques par exemple. Sans doute, l’Etat, soucieux de ne pas laisser le champ de l’action sociale aux seules mains de certains acteurs politiques suspectés de récupération électoraliste ou partisane, commence à agir pour les plus vulnérables mais ce n’est pas encore suffisant.

71En conséquence, on voit émerger de nouvelles solidarités communautaires qui s’appuient sur les technologies numériques comme la vidéo en ligne et permettant des mobilisations solidaires élargies. On peut parler d’une mutation dans la mesure où on observe le recours croissant aux technologies de la communication, le dépassement des premiers cercles des donateurs et la maîtrise des codes de la mise en scène de « la pub humanitaire ». Mais on relève de la continuité car ces vidéos sont fortement ancrées dans la tradition religieuse de la solidarité interindividuelle et communautaire. Il s’agit au mieux d’une sorte de « crowdfunding » d’aide aux pauvres et nullement d’une réelle sécurité sociale pour tous.

Conclusion

72Ces vidéos courtes et personnelles rendent plus visible l’individu vulnérable et agissent comme des supports de communication assez efficaces car elles sont facilement partageables sur les plateformes de vidéo qui leur assurent une bonne audience. Après le premier cercle de la famille proche permis par la commutation interpersonnelle, la vidéo en ligne, en tant que dispositif de communication numérique, permet de toucher un deuxième cercle beaucoup plus large c’est-à-dire celui du grand public. Par exemple, les MRE très connectés et qui bénéficient d’une plus grande aisance financière que les compatriotes restés au pays, peuvent représenter une cible de choix pour les malades et leurs proches.

73De plus, Internet, en tant que nouveau média technologique, peu contrôlé par le pouvoir, facilite incontestablement plus la visibilité des situations de vulnérabilité dans l’espace public et médiatique marocain. Dans ce contexte socio-économique difficile, la vidéo de charité vole au secours du système défaillant de santé marocain. Aussi, la figure du « bienfaiteur » est centrale dans cet univers culturel et religieux basé sur le devoir de charité ou « sadaqa » présentée comme un pilier moral du vivre ensemble. Cette stratégie dépasse le cercle traditionnel (famille et proches) et vise tous les e-donateurs membres la « oumma » (nation supranationale ou transnationale) et semble efficace.

74Enfin, au Maroc alors que la pauvreté continue de frapper une large proportion de citoyens, ou la solidarité familiale montre des limites et où les moyens engagés par l’Etat (Ramed ou INDH) restent insuffisants, les personnes vulnérables utilisent, de plus en plus, les nouveaux médias pour tirer davantage de ressources de la charité numérique transnationale.

75Mais, il s’agit plus d’appel à la charité interindividuelle (soutien informel et cas individuels) qu’à une véritable solidarité collective (institutionnelle et causes collectives). Autrement dit contrairement à l’action collective de mobilisation destinée au collectif et en faveur de tous, il s’agit ici d’une auto-exposition individuelle destinée au collectif mais au seul bénéfice de l’individu et de ses proches. En résumé, ces nouvelles formes d’engagement solidaire, via la vidéo de charité numérique, construisent sans doute une nouvelle relation entre internautes marocains complétant et dépassant les manifestations traditionnelles de la solidarité familiale et institutionnelles. Concrètement, ces nouvelles mobilisations numériques pallient en partie les défaillances de la solidarité familiale et étatique en les déplaçant vers de nouvelles solidarités citoyennes et transnationales mais en restant ancrées dans la culture religieuse solidariste arabo-muslmane.

76Face au désengagement de l’Etat, ce sont des individus isolés, faibles et vulnérables que le bienfaiteur potentiel pourrait aider par devoir religieux et moral. En l’absence d’une véritable couverte sociale pour tous, on peut se demander, si la charité des bienfaiteurs peut durablement se substituer à une vraie politique de santé de l’Etat marocain ? On ne peut qu’espérer la généralisation rapide de la sécurité sociale au Maroc qui mettra fin à la prolifération de ces vidéos de charité en ligne. Sans quoi, ces personnes vulnérables continueront encore de dépendre largement de la charité probable mais incertaine des bienfaiteurs.

77Dans une recherche future, nous prévoyons de prolonger cette étude dans deux directions : d’une part, étudier les nombreux commentaires qui accompagnent les vidéos pour voir, analyser et décrire ce que les internautes disent de ce phénomène émergent et d’autre part, interroger les responsables du site Hespress sur les critères de sélection et de diffusion des vidéos d’appel à l’aide.

78Atifi Hassan, (2003).La variation culturelle dans les communications en ligne: analyse ethnographique des forums de discussion marocains. Langage et société (104), 57–82.

79Atifi Hassan, Gaglio Gérald, (2012), « L'internet des aidants » in, Internet et santé. Acteurs, usages et appropriations., 311–329. PUC, Montréal.

80Bennett W. Lance, Segerberg Alexandra, (2011). Digital media and the personalization of collective action: Social technology and the organization of protests against the global economic crisis. Information, Communication & Society 14 (6): 770–99.

81Cardon Dominique, Granjon Fabien, (2013).Médiactivistes, 2e éd., Paris, Presses de Sciences Po (P.F.N.S.P.), « Contester », 200 pages.

82Bernier Guylain, (2015). La Vidéo de soi sur internet : Rendre visible sa différence, au-delà de la technologie, les fondements sociaux, L’Harmattan, Paris.

83Bouillot Charlotte, (2016). YouTube « Broadcast Yourself »: Le début de la révolution vidéo sur Internet, éd. 50 minutes, Business Stories, numéro 7, format e-Pub.

84Bourgatte Michaël, (2015). L’essor de la vidéo, indispensable outil des enseignants, in The Conversation, en ligne, http://theconversation.com/lessor-de-la-video-indispensable-outil-des-enseignants-48347

85Cardon, Dominique, (2010). La démocratie internet. Promesses et limites, Paris : Seuil.

86Cosnier Jaques (1994). Psychologie des émotions et des sentiments, Paris : Retz.

87Devars Thierry, (2016­). Quand les youtubeurs investissent le champ politique, en ligne, http://www.inaglobal.fr/numerique/article/quand-les-youtubeurs-investissent-le-champ-politique-9494

88Dessinges Catherine, (2008). Emotion, collectif et lien social : vers une approche sociologique du don humanitaire. Revue du MAUSS, La découverte, 2008, pp.203-221. <hal-00590758

89Gervais Jean-François, Blanchot Guillaume, Clemenceau David, Jacobson Michel, Rault Éric, (2010). « Modèles économiques et techniques », Documentaliste-Sciences de l'Information, 4/2010 (Vol. 47), p. 30-41.

90Gauducheau N., (2012). « Internet et le soutien social » in Internet et Santé. Acteurs, usages et appropriations, 93–112. Pr. Univ. Quebec, Quebec.

91Herring, S.C., (2004). « Computer-Mediated Discourse Analysis: An Approach to Researching Online Communities » in S. A. Barab, R. Kling, J. H. Gray (eds), Designing for Virtual Communities in the Service of Learning. Cambridge / New York, Cambridge University Press, pp.338-376.

92Hymes D. H., (1972). “ Models of the interaction of Language and Social Life ”, in J. Gumperz, D. H. Hymes (eds.),  Directions in Sociolinguistics. The Ethnography of Communication, New York, Holt, Rinehart & Winston : 35-71.

93J.J. Levy, J. Dumas, Ryan B. et Thoër, C. (2011). Minorités sexuelles, Internet et santé, Presses de l'Université du Québec, Collection Santé et société.

94Kerbart-Orecchioni C. (1994). Les Interactions verbales, III, Paris, Armand Colin.

95Mattelart Tristan (2009) « Les diasporas à l’heure des technologies de l’information et de la communication : petit état des savoirs » in TIC & Société, vol. 3, n° 1-2. http://ticetsociete.revues.org/600.

96Mabi C., Theviot A. (dir.), (2014). « S'engager sur Internet. Mobilisations numériques et pratiques politiques ». Politiques de communication, n° 3, automne, 176 p., Grenoble, Presses universitaires de Grenoble,

97Maloney-Krichmar, D. & Preece, J., (2005). A Multilevel Analysis of Sociability, Usability, and Community Dynamics in an Online Health Community. ACM Transactions on Computer-Human Interaction, 12, 201-232.

98Médiamétrie, (2016). La vidéo en France en 2016. Pratiques et enjeux. 51

99Mercier Arnaud. (2015). Le rôle des réseaux socionumériques pendant les attentats de Paris, in The Conversation, http://theconversation.com/le-role-des-reseaux-socionumeriques-pendant-les-attentats-de-paris-50724

100Munch B., (1992), Les Constructions référentielles dans les actualités télévisées, Berne : Peter Lang.

101Nel N., (1990), Le Débat télévisé, Paris : Armand Colin.

102Poster, Mark. (2007). Internet Piracy as Radical Democracy, en L. Dahlberg y E. Siapera (eds.), Radical Democracy and the Internet. Interrogating Theory and Practice, Nueva York: Palgrave-macmillan, pp. 207-225.

103Scopsi Claire, Gouet-Brunet Valérie, Guillaume Louis-Pierre, Nayrolles Lise, Battisti Michèle, (2010). « Les nouveaux territoires de la vidéo », Documentaliste-Sciences de l'Information, 4/2010 (Vol. 47), p. 42-53.

104Thoër, C., Levy, J.J, (2012), Internet et santé. Acteurs, usages et appropriations., 311–329. PUC, Montréal, 2012.

105Ungerer F., (1997). “Emotions and emotional language in English and German new stories”, inNiemeier S., Dirven R. (eds), The language of emotions, Amsterdam/Philadelphia : John Benjamins, 307-328.

106Walther, J. B. & Boyd, S., (2000). Attraction to computer-mediated social support, In Lin C.A, Atkin D (Eds.), Communication technology and society: Audience adoption and uses (pp. 153-188).Cresskill, NJ: Hampton Press.

107Wojcik, Stéphanie, (2011). « Prendre la démocratie électronique au sérieux. De quelques enjeux et controverses sur la participation politique en ligne », In Internet, machines à voter, démocratie.  Elsa Forey et Christophe Geslot (dir.). L’Harmattan, Collection « Questions contemporaines », p. 111-141.

10816  Traduction : selon Abou Hourayra, le Messager de Dieu a dit «Quiconque, en ce bas monde, a allégé l’affliction d’un croyant, verra Dieu alléger son affliction au jour du Jugement Dernier. Quiconque secourt un homme dans la gêne, verra Dieu le secourir en ce bas monde et dans l’Autre. Quiconque couvrira les fautes d’un Musulman, verra Dieu les lui couvrir en ce bas monde et dans l’Autre », rapporté par Muslim.

Notes

1  http://www.inaglobal.fr/numerique/article/les-plateformes-video-la-conquete-de-nouveaux-horizons, par Remi Jacob.

2  Voir http://www.hespress.com/.

3  http://www.audiencelemag.com/?article=92

4  http://theconversation.com/.

5  En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/pixels/article/2017/02/18/sur-youtube-le-grand-deballage-des-courses-de-supermarche_5081609_4408996.html#PeczYT3GGTdSAogh.99

6  https://www.webmarketing-com.com/2015/11/16/42932-integrer-video-strategie-marketing

7 http://www.jeuneafrique.com/171981/politique/corruption-au-maroc-le-sniper-de-targuist-poursuit-son-combat-visage-d-couvert/

8  http://telquel.ma/2015/04/16/fonctionnaire-du-parlement-filmee-en-flagrant-delit-corruption_1442627

9  http://telquel.ma/2015/04/16/fonctionnaire-du-parlement-filmee-en-flagrant-delit-corruption_1442627

10  Voir par exemple http://temoins.bfmtv.com/, première chaine d’information en continue française

11  Voir https://michaelpaes.wordpress.com/2015/01/25

12  Voir http://financeparticipative.org/barometres/1er-semestre-2015/

13  Voir http://www.lemonde.fr/pixels/article/2017/02/08/facebook-lance-un-outil-permettant-de-proposer-de-l-aide-en-cas-de-crise_5076639_4408996.html#

14  Voir http://www.cotizi.com/100dhpouraider

15  http://www.huffpostmaghreb.com/2016/07/21/zero-grissage-contre-les-_n_11111900.html

17  “ L’hypothèse partagée par les partenaires d’une interaction sociale, que chacun est capable d’éprouver des affects analogues à ceux d’autrui.” (Cosnier 1994 : 161).

18  http://www.indh.gov.ma/index.php/fr/

19  http://www.recma.org/actualite/les-nouvelles-formes-de-solidarite-dans-un-monde-en-mutation-sfax-novembre-2010

20  Voir http://telquel.ma/2014/10/07/maroc-pays-connecte-du-maghreb_1418369

21  http://telquel.ma/2015/07/09/groupe-immobilier-offre-maison-jeune-handicapee-violee_1455220

22  La charité envers les pauvres ou démunis est bien sûr aussi et autant valorisée dans les autres religions.

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Hassan ATIFI, «La vidéo en ligne de charité : un nouveau média de mobilisation solidaire au Maroc», French Journal For Media Research [online], Browse this journal/Dans cette revue, 8/2017 Nouvelles dynamiques médiatiques et numériques - New media and digital dynamics, 8/2017 Nouvelles dynamiques médiatiques et numériques - New media and digital dynamics, last update the : 22/01/2019, URL : https://frenchjournalformediaresearch.com:443/lodel-1.0/main/index.php?id=1388.

Quelques mots à propos de :  Hassan ATIFI

Maître de Conférences en sciences de l’information et de la communication
Equipe Tech-CICO (Technologies pour la Coopération, l’Interaction et les
Connaissances dans les collectifs)/ Institut Charles Delaunay, UMR STMR 6279 «
Sciences et Technologies pour la Maîtrise des Risques »
hassan.atifi@utt.fr

 

 

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