French Journal For Media Research

Isabelle Touitou

Genre de lunettes et lunettes du genre dans les médias
une revue illustrée

Texte intégral

1Résumé
La représentation des lunettes dans les médias semble découler de stéréotypes construits autour de croyances persistantes dans l’inconscient collectif. Des travaux portant sur la perception des lunettes, et leur possible instrumentalisation comme élément de mise en scène visuelle du soi, ont interrogé diverses dimensions psychosociologiques. Globalement les porteurs de lunettes sont perçus comme plus intelligents, plus timides et moins séduisants, mais les résultats divergent parfois, appelant à une meilleure prise en compte de certains paramètres tels que le type de lunettes, l’âge, le genre, le niveau socio-éducatif et la culture de celui qui les porte ou qui les juge. Cet article décrit les principaux éléments impliqués dans les stéréotypes liés au port de lunettes, puis les illustre par quelques exemples représentatifs sélectionnées dans la publicité, le monde politique et académique.
Mots-clés
Lunettes, genre, registre sociologique, media
Abstract

2The representation of glasses in the media seems to stem from stereotypes built around persistent beliefs in the collective unconscious. Studies on the perception of glasses, and their possible use as an element of visual self-presentation, have questioned various psycho-sociological dimensions. Overall, eyeglasses wearers are perceived as more intelligent, shyer and less attractive, but the results sometimes differ, calling for a better consideration of certain parameters such as the type of spectacles, age, gender, socio-educational level and culture of the person who wears or judges them. This article describes the main elements involved in stereotypes associated with the wearing of glasses, then illustrates them with a few representative examples selected from advertising, politics and academia.<

3Key words<

4Glasses, gender, sociological register, media

Introduction

5Le visage humain révèle à la personne qui le regarde une grande quantité d'informations telles que son âge approximatif, son sexe, mais aussi ses expressions non verbales à l’origine de la perception de caractéristiques distinctives plus subjectives telles que son intelligence ou son attrait (Bruce & Young, 1986; Leder et al., 2011). En raison de leur position proéminente dans le champ visuel, souvent au niveau des yeux de l'observateur, les visages sont traités de manière très focale, ce qui permet des analyses visuelles particulièrement détaillées. Cette perception du visage peut facilement être modifiée par le port d’un élément qui en altère la structure comme les lunettes (Warr, 1968). Il a été démontré depuis longtemps que les gens utilisent les attributs physiques pour évaluer les propriétés durables et transitoires des autres personnes. (Hellström & Tekle, 1994). En tant que telles, les lunettes représentent un élément majeur de représentation corporelle, au même titre que la barbe, le maquillage ou la tenue vestimentaire. Les lunettes ont fait l’objet de nombreuses études, par le prisme de leur histoire, de leur représentation dans l’art, de leur utilisation médicale, de leur signification sociologique, ou comme objet de communication.

Les lunettes (étymologiquement «objet en forme de lune»1) semblent avoir été inventées en Italie à la fin du XIIIème siècle2 (Pansier, 1901), contrairement à ce que suggèrent certaines peintures, et initialement utilisées par les moines pour recopier ou lire les manuscrits3.
Figure : L’anachronisme de l'apôtre « aux lunettes » de Conrad von Soest
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6Cette illustration montre un apôtre portant des bésicles, ancêtres des lunettes, alors que celles-ci n'existaient pas encore à l'époque. Le peintre a instrumentalisé les bésicles comme symbole d’érudition.

7Elles sont devenues plus performantes grâce aux progrès de la médecine et de l’optique (Knoll, 1978), mais aussi plus esthétiques au fil du temps. Ainsi, initialement indispensables pour la lecture, les lunettes peuvent aujourd'hui être remplacées par des lentilles de contact, en fonction de l'humeur ou de la motivation, même en dehors d’un contexte de malvoyance (lunettes de soleil). Témoins de vieillissement dans le passé, les lunettes ne sont plus perçues comme un objet ringard, puisque 76% de Français en portent et l’assument aujourd’hui4, contre seulement 40% il y a une trentaine d’années (Vettraino-Soulard, 1991). La publicité et les conseillers en communication de tout genre ont joué un rôle dans cette transition en surfant sur tous les médias.

8Les lunettes nous intéressent particulièrement car elles constituent une sorte d’écran entre la personne qui les porte et celle qui la regarde, élargissant ainsi leur usage purement fonctionnel en un outil manipulable et communicant dans des registres sociologiquement multiples. Peu d’articles ont réuni ces différents aspects. Cette revue a pour but de synthétiser les données actuelles sur le port des lunettes dans sa signification sociologique, sa perception genrée, puis comme outil de communication en illustrant l’impact des stéréotypes qui lui sont liés par quelques exemples puisés dans l’espace médiatique, celui de la publicité comme vecteur de signifiant, et celui des mondes politique et académique, comme récepteur de messages.

Les lunettes pour faire sérieux, cacher son émotion, ou séduire ?

9Encore principalement utilisées pour leur fonction première, les lunettes ont progressivement acquis une dimension communicationnelle, pour véhiculer de façon calculée ou non les codes culturels du savoir ou du pouvoir, pour servir de paravent au regard de l’autre, ou au contraire pour capter son intérêt et plaire. Ainsi, au-delà de la nécessité médicale, mettre ou ne pas mettre de lunettes dénote une préférence personnelle, qui peut elle-même découler d’une adhésion à des croyances populaires. Dans son célèbre ouvrage « mise en scène de la vie quotidienne », Goffman observe que les gens adaptent leur présentation de soi en fonction de la réaction qu'ils souhaitent obtenir ou susciter chez les autres (Goffman, 1973). Les stéréotypes en général, et ceux concernant le port de lunettes en particulier, ont la peau dure à tel point qu’ils imprègnent notre perception des autres dès l’enfance. Des écoliers à qui on soumet des images de professionnels sont plus enclins à reconnaître les porteurs des lunettes comme des scientifiques (Chambers, 1983).

10Comment ces codes se sont-ils construits ? Terry a été pionnier en la matière. Il a analysé la signification du port des lunettes sous tous les angles : le genre (Terry, 1989; Terry & Hall, 1989), la reconnaissance faciale (Terry, 1993), et l’impact socio psychologique (Terry et al., 1983; Terry & Brady, 1976, 1976; Terry & Krantz, 1993; Terry & Kroger, 1976; Terry & Zimmerman, 1970). S’appuyant largement sur ses travaux, d’autres ont positionné la présentation de soi par les lunettes en regard de ces codes, comme nous le décrirons plus loin. Le port de lunettes comme indicateur performatif de personnalité s’ancre dans plusieurs registres sociologiques, que nous déclinerons en trois catégories pour simplifier notre propos : importance, émotion et séduction. Naturellement, nous gardons à l’esprit que cette distinction est quelque peu artificielle, car il est bien connu que les évaluations positives liées à l’importance ou l’émotion sont plus susceptibles d'être associées à des visages attrayants qu'à des visages peu attrayants (McKelvie, 1997).

Importance, compétence

11L’effet du port de lunettes sur le jugement de la personnalité des gens a été rapporté dès 1943 (Thornton, 1943). Ce chercheur a montré que les personnes photographiées avec des lunettes étaient généralement jugées plus intelligentes, fiables, diligentes et honnêtes que les mêmes personnes photographiées sans lunettes. L’équipe de Manz a réitéré la même expérience 25 ans plus tard sur une population d’étude allemande et a fait le même constat (Manz & Lueck, 1968). D’autres ont confirmé de façon plus ou moins nuancée ce résultat sur des photos-stimuli. Par exemple, deux auteurs ont montré que les porteurs de lunettes apparaissaient certes plus intelligents, mais aussi plus bienveillants (Hellström & Tekle, 1994) ou plus ennuyeux (McKelvie, 1997). Dans une étude menée en France, la cible portant des lunettes était plus fréquemment associée à un groupe socioprofessionnel de statut élevé, démontrant ainsi qu'un indice commun d'apparence faciale est suffisant pour activer un stéréotype d'appartenance à un groupe social (Gueguen, 2015). Graham a demandé à des participants d’évaluer des images de personnes portant ou non des lunettes sur trois traits sociaux (confiance, compétence et attrait) (Graham & Ritchie, 2019). Les lunettes n'ont eu un effet positif que sur le premier trait. Argyle tacle les expériences de perception d'une personne réalisées à partir de photographies (Argyle & McHenry, 1971). Après avoir réalisé des vidéos sur des acteurs avec et sans lunettes, soit statiques pendant 15 secondes, soit interviewés pendant 5 minutes, il découvre que les évaluateurs attribuent 12 points de QI supplémentaires dans la première condition expérimentale. Boshier confirme pourtant le stéréotype liant lunettes et intelligence dans des vidéos où des juges ont estimé que sept des huit élèves observés étaient plus intelligents lorsqu'ils portaient des lunettes (Boshier, 1975). Le port de lunettes conduit également le plus souvent à une augmentation de la perception de la compétence ou du professionnalisme. (Fetscherin et al., 2020; Terry & Krantz, 1993; Tsou et al., 2016), mais comme on l’a vu ce résultat n’a pas toujours été observé (Graham & Ritchie, 2019).

12Une conséquence (inquiétante ?) est que ce type de jugement de valeur peut inconsciemment biaiser le comportement et les choix des observateurs en diverses circonstances, comme cela a pu être démontré :

  • Elections. Le port de lunettes favorise les candidats lors d’élections, quelle que soit l’orientation politique des votants. Lors d’une expérience de simulation électorale, des paires (avec et sans lunettes) de photos de personnages politiques ont été présentées dans un ordre aléatoire à des participants à qui on a demandé pour qui ils voteraient. La probabilité de voter pour les porteurs de lunettes était quatre fois plus élevée lorsque les modèles et les électeurs étaient américains, mais cet effet n'a pas été détecté lorsque ceux-ci étaient indiens (Fleischmann et al., 2019).

  • Recrutement professionnel. Deux études, l’une réalisée sur des photos de femmes, et l’autre d’hommes, ont croisé l’effet des lunettes avec plusieurs éléments de présentation visuelle. Dans la première, de vraies agences de recrutement ont mieux noté des CV fictifs lorsque la photo de la pseudo candidate à l'emploi montrait des éléments de toilette masculins (cheveux relevés, lunettes et pas de maquillage) par rapport à des éléments typiquement féminins (cheveux lâchés, pas de lunettes et maquillage) (Heke, 2010). Dans l’étude chez les hommes, le port de lunettes et d'une cravate a eu un effet positif sur l'impression de compétence, ce qui a résulté en un effet indirect sur l'employabilité (Fetscherin et al., 2020).

  • Verdicts dans les tribunaux. Une expérience portant sur l’impact de la race de l'accusé et le port de lunettes a montré que ces deux éléments affectent les décisions des jurés. Les lunettes ont eu un effet indirect sur le verdict en augmentant l'évaluation de l'intelligence, ce qui a diminué les verdicts de culpabilité (Brown et al., 2008).

13Le stéréotype liant les lunettes aux traits associés à l’importance dépend de plusieurs facteurs, dont le plus important est le genre, qui pour cela, sera développé dans un chapitre dédié. Le port de lunettes, en raison de sa relation avec le niveau d’instruction, introduit une fracture sociale considérable chez les plus jeunes (Bozon, 2006). La culture et/ou l’économie d’un pays participent sans équivoque à ce stéréotype, comme le suggère le fait qu’on le retrouve aux Etats-Unis (Fetscherin et al., 2020) et en France (Gueguen, 2015), mais pas en Jordanie (Al Ryalat et al., 2022) ni en Inde (Fleischmann et al., 2019). Ces observations reposent en partie sur un fondement physiopathologique dans la mesure où la myopie est associée au moins en Europe, à un niveau d'éducation élevé (Williams et al., 2015), et où le risque de presbytie augmente avec l’âge (Lafosse et al., 2020). Enfin, plus matériellement, le type de lunettes influence aussi leur perception, les lunettes ordinaires renforçant l'autorité apparente d'un individu, tandis que les lunettes de soleil la diminuent (Bartolini et al., 1988).

Expressivité émotionnelle

14Dans ce registre, c’est l’obstruction des yeux qui est concernée, comme le rappelle Margolin dans l’annotation introductive de son article « des lunettes et des hommes » (Margolin, 1975) :

15« Dès qu'un inconnu s'approche de moi avec des lunettes sur le nez, je me sens une mauvaise humeur que je ne puis surmonter... Que puis-je savoir d'un homme dont je ne vois pas les yeux pendant qu'il parle, et qui a le miroir de son âme voilée par deux morceaux de verre qui m'aveuglent ? »5. Mais voir sans être vu peut revêtir plusieurs significations, la timidité (se cacher aux autres, se protéger), ou au contraire le « starisme » (se cacher des paparazzis, ou à l’inverse se faire remarquer…).

16Les lunettes ont d’abord été associées au fait d’être plus craintif, timide, dépendant, doux, sensible, et d’avoir moins de force sociale (Al Ryalat et al., 2022; Elman, 1977; Terry & Krantz, 1993). Cet effet peut dépendre d’autres caractéristiques de présentation corporelle. Une étude a révélé que la différence de perception dans le registre émotif entre les personnes avec et sans lunettes n'était significative que chez les personnes cibles de petite taille, mais pas lorsqu'elles étaient grandes (Elman, 1977). Des recherches ont également montré que les personnes qui portent des lunettes ont tendance à être plus anxieuses (Terry & Zimmerman, 1970), ennuyeuses et snob (McKelvie, 1997), et à avoir une plus faible estime de soi (Birchard, 2002; Terry et al., 1983; Terry & Brady, 1976). Ce dernier point est interprété en fonction de l’âge, les enfants étant peut-être plus susceptibles que les adolescents d'intérioriser les réactions sociales négatives évoquées par les lunettes, tandis que les adultes réagissent négativement aux signes de vieillissement et de déclin physique. Selon Harris, une personne dont les yeux sont partiellement cachés par des lunettes peut être perçue comme dissimulant des informations, moins ouverte et donc plus mystérieuse qu’une personne qui n’en porte pas (Harris, 1991). Là encore, la forme (Okamura & Ura, 2020) et le type de lunettes modulent ces impressions. Les lunettes sans monture augmenteraient la perception de la confiance (Leder et al., 2011), alors que des lunettes sombres la réduiraient (Graham & Ritchie, 2019) et seraient utilisées pour dissimuler l’expression émotionnelle (Tifferet & Vilnai-Yavetz, 2014). De même, une étude menée sur plus de 60 000 évaluations de 800 photos de profil dans la base de données Photofeeler a révélé que les lunettes de soleil peuvent ajouter une touche de mystère, mais au prix d’une baisse du score de sympathie, alors que l'obstruction des yeux par les cheveux ou une ombre n’impacte pas ce score, mais fait baisser celui de la compétence et de l'influence (Photofeeler, 2014).

17La « peopolisation » s’inscrit dans une lecture opposée et manipulatrice de l’utilisation des lunettes « pour se cacher », qui est parfois interprétée comme de l’arrogance (je te vois mais tu n’as pas accès à moi). Confortant cette interprétation, des lunettes noires incarnent l’arrogance dans certains émoticônes. Plus nuancé et poétique, Karl Lagerfeld à qui l’on demandait pourquoi il portait toujours des lunettes noires, répondit « les lunettes sont des ombres à paupière portables. A travers les verres teintés, le monde est plus beau et tout le monde rajeunit instantanément de 10 ans»6.

Séduction

18Après avoir interrogé la perception des caractéristiques intellectuelles et sociales des porteurs de lunettes, un troisième registre clé à considérer est leur effet sur le pouvoir de séduction. Les chercheurs ayant analysé le port de lunettes comme seule variable dépendante sur des photos stimuli ont globalement détecté une chute significative de l’attractivité d’une personne, que l’observateur soit une personne réelle (Al Ryalat et al., 2022; Edwards, 1987; Hasart & Hutchinson, 1993; Leder et al., 2011; Lundberg & Sheehan, 1994; Terry & Brady, 1976; Tsou et al., 2016), ou une solution d’intelligence artificielle entrainée pour la détection des traits faciaux (Obwegeser et al., 2022; Vernon et al., 2014). Cet effet peut être nuancé lorsqu’on y associe des cofacteurs. Par exemple, le port de lunettes a moins d’influence si le modèle de montures a de petits bords (Lo et al., 2012). Chez les personnes aux dents mal alignées, le port de lunettes et de boucles d'oreilles aggravent l'appréciation de l’esthétique du visage (Obwegeser et al., 2022). Il est nécessaire aussi de prendre en compte des variables épidémiologiques telles que le genre, l’âge ou le pays d’origine. Ainsi l'impact de la connotation visuelle négative des lunettes est majeure chez les jeunes, les moqueries des autres élèves en étant la cause dans un cinquième des cas (Huang et al., 2017). Une équipe de chercheurs, ayant observé les conséquences néfastes sur la scolarité des enfants et les adolescents refusant les lunettes, a préconisé une intervention médiatique visant à promouvoir leur attractivité (Kodjebacheva et al., 2015). L’effet négatif du port de lunettes sur l’attrait des personnes tend à s’estomper avec l’âge (Obwegeser et al., 2022), et est peut-être corrélé avec l’impression, surtout chez les hommes, que les lunettes vieillissent (Harris, 1991). Il est intéressant de noter qu'une étude chinoise sur des photos de personnes souriantes n'a trouvé aucun lien entre le port de lunettes et la perte d'attractivité, ce qui suggère que les qualités sociales personnelles compensent au moins partiellement la perception délétère de cet accessoire, mais on ne peut exclure l’impact culturel dans l’interprétation de ce résultat (Lo et al., 2012).

Le genre des lunettes

19Nous consacrons un paragraphe à part entière au genre car il représente un élément majeur dans la perception des lunettes, et en cela a été particulièrement bien étudié.

20La première considération qui vient à l’esprit est le genre de l’examinateur lui-même. Dans quelle mesure peut-il engendrer un biais de jugement lorsque celui-ci évalue des photos d’hommes et de femmes? Cette question a été posée et les résultats sont variables, parfois contradictoires. Dans certaines études, le genre de l’évaluateur n’a pas affecté sa perception du statut professionnel de sa cible (Gueguen, 2015), de sa valeur sociale, de sa force sociale et de sa compétence mentale (Terry & Krantz, 1993), ou de son attrait physique (Mehrabian & Blum, 1997) en fonction des lunettes. Parfois, le genre de l’évaluateur avait tendance à modifier son jugement, mais pas de manière significative. Des candidates fictives à un poste de direction sont considérées comme plus masculines si elles portent des lunettes par les recruteuses, alors que le résultat est inversé lorsqu’il émane de recruteurs (Heke, 2010). Des évaluations plus extrêmes chez les évaluateurs que chez les évaluatrices ont été notées dans une étude confirmant que les femmes qui portent des lunettes paraissent plus intelligentes et plus froides que celles qui n’en portent pas (Hamid, 1972). Dans une autre étude, les hommes percevaient les femmes portant des lunettes comme plus attirantes et plus féminines, alors que ces femmes elles-mêmes se trouvaient moins séduisantes (Harris, 1991).

21Qu’en est-il du côté des personnes évaluées sur leur photo ? En général, les femmes qui portent des lunettes sont jugées moins attirantes et moins sexy (Ruth & Richards, 1974; Terry, 1989; Terry & Hall, 1989), alors que les hommes au contraire améliorent leur score d’attractivité en portant cet accessoire (Terry & Hall, 1989). Par ailleurs, les femmes, contrairement aux hommes, portent des lunettes dans des proportions qui varient très peu selon le milieu social (Bozon, 2006). Ainsi, le port de lunettes incarnerait principalement un élément de statut social et professionnel pour les hommes, assez clairement identifié comme tel, alors que pour certaines femmes, il existerait une résistance esthétique au port de lunettes (Bozon, 2006). En outre, une analyse d’interaction entre le genre et le type de lunettes a montré que les femmes portant des lunettes ordinaires étaient considérées comme plus honnêtes que celles jugées dans toutes les autres conditions, tandis que les hommes portant des lunettes de soleil étaient considérés comme les moins honnêtes (Bartolini et al., 1988).

22L’impact du port de lunettes a été confronté à celui d’autres caractéristiques physiques genrées. Terry a constaté que les cheveux longs des femmes, comme les lunettes, nuisent à la perception de leur force sociale, et que la pilosité faciale des hommes, contrairement aux lunettes, nuit à la perception de leur capacité mentale (Terry & Krantz, 1993). Il explique cela chez les femmes en considérant l’impact cumulé de ces deux variables sur la maturité faciale apparente. Bien que les lunettes soient souvent un signe de détérioration visuelle sénescente, les verres et leurs montures pourraient amplifier certaines caractéristiques associées à l'immaturité et à la jeunesse du visage, comme la taille et la distance entre les yeux ainsi que la hauteur des sourcils (Cunningham et al., 1990). De la même façon, les cheveux longs des femmes adoucissent le contour du visage et soulignent sa rondeur. Lunettes et cheveux longs peuvent donc contribuer à l'image d’infantilisation, une caractéristique liée à une moindre force sociale. Du côté des hommes, ce même auteur suggère que le port de lunettes étant davantage associé à un travail de près, comme la lecture et l'écriture, qu’à un travail de loin, comme les activités sportives, l'effet positif des lunettes sur l’évaluation des capacités mentales pourrait donc être l’illustration d'une inférence fonctionnelle. Au contraire, la barbe soulignant le schéma de l’homme viril présentant un avantage sur ses concurrents sexuels pourrait paraître plus fort socialement qu'il ne l'est cognitivement.

23En résumé, les femmes ont tendance à avoir une image plus négative des lunettes que les hommes, que le trait jugé soit la personnalité ou le physique, un résultat attribué à l'importance accordée à la féminité et à la séduction des femmes dans notre société (Heke, 2010), et à l’origine du taux plus élevé de port de lentilles de contact chez les femmes que chez les hommes (Terry, 1989).

Se montrer et être vu dans les médias 

24Les porteurs de lunettes sont donc globalement perçus comme plus intelligents (surtout les hommes), plus timides, et moins attirants (surtout les femmes). Cette perception stéréotypée est-elle captée et restituée intégralement dans la façon dont les personnes se présentent à nous visuellement ?. Afin d'examiner dans quelle mesure le port de lunettes, en tant que modalité d'exposition de soi, intègre la perception de l'autre en 2023, nous avons sélectionné quelques exemples particulièrement démonstratifs dans lesquels nous avons recherché les stéréotypes décrits ci-dessus, puis nous avons tenté de décrypter leur mise en scène en termes de significations sociologiques possibles. Comme un même type de message peut être déployé dans un contexte multimédia, la presse écrite, la télévision, les réseaux sociaux ou les sites web, nous avons décidé de les présenter ces exemples en fonction de la finalité de la communication, plutôt que de son canal médiatique. Nous commencerons par la publicité dont les messages s’appuient ouvertement sur la symbolique et l’usage performatif des lunettes, puis nous résumerons quelques travaux intégrant le port de lunettes comme élément de présentation de soi dans deux contextes professionnels faisant appel à des enjeux personnels éloignés, le monde politique et le monde académique. Nous y ajouterons quelques illustrations issues des médias audiovisuels.

Conseil et publicité

25L’influence des stéréotypes liés aux lunettes est telle qu’elle a donné lieu à une pléthore de conseils spécifiques sur des blogs internet dont le but annoncé, mais pas toujours encadré, est d’améliorer la perception de soi sur les photos, selon le but de la démarche : recherche d’emploi, amitié ou rencontres, pour ne citer que ceux-là7. Adhérant aux codes les plus classiques et les plus populaires, ces blogs conseillent le port de lunettes pour paraître sérieux, et le déconseillent pour avoir l’air sympathique.

Une étude parue en 1988 et basée sur trois conditions expérimentales (sans lunettes ou avec des lunettes claires ou sombres) recommande aux publicitaires des lunettes claires pour renforcer la perception favorable des acteurs, ce conseil n’étant plus utile lorsque l'endossement d'un produit spécifique exige qu'un individu soit perçu comme riche, attrayant, sexy, agréable, ou sympathique (Bartolini et al., 1988). En 1991, un article entier consacré à l’image publicitaire des lunettes fustigeait la « domination féminine » dans la publicité (Vettraino-Soulard, 1991). Les professionnels de l’optique ont engagé des efforts commerciaux et financiers impressionnants pour renverser l’image vieillissante des lunettes et les transformer en accessoires de bien-être et de plaisir, avec une communication massivement déclinée au féminin, une paire pour chaque moment de la vie, comme en témoigne la campagne publicitaire d'un grand lunetier français, diffusée à la télévision, dans la presse, le numérique, les réseaux sociaux et la communication locale en juin 20218.
Figure : Alice Taglioni égérie des lunettes multifonctions
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26Le loisir Le travail Le plaisir

27Les panneaux de gauche et de droite montrent un arrière-plan dans la nature, images de liberté encadrant la photo centrale, où seul le document que l’actrice tient dans les mains indique le contexte professionnel. Elle est souriante dans les trois conditions, heureuse de « changer de look » en présentant trois montures différentes. Sa tenue vestimentaire claire et sa blondeur semblent se fondre dans le décor comme pour mettre en valeur les lunettes. Le plaisir est doublé de coquetterie dans la photo de droite où elle affiche un regard de type légèrement « séducteur » selon Bell (Bell, 2012), orienté subtilement de bas en haut.

28Le choix de l’actrice, Alice Taglioni, est annoncé dans le communiqué de presse comme un « modèle français de grâce et de glamour ». Il s’agit de proposer « une lunette de vue pour le quotidien, une autre pour profiter du soleil, mais aussi une paire de lunettes pour ceux qui adorent changer de look : avoir plusieurs paires de lunettes c’est utile mais c’est aussi pour se faire plaisir ! » Le communiquant surfe sur le mot « plaisir », répété cinq fois en 30 secondes. L’envie prend le pas sur le besoin. L’usage esthétique dépasse la fonction utilitaire.

29En 2022, une nouvelle campagne multimédia volontairement « en rupture avec les précédentes », est réalisée sur un mode ludique et joyeux qui dépoussière à nouveau le paradigme des lunettes associées à l’âge9. Cinq personnages s’intercalent au gré des clips pour jouer du regard de façon décomplexée et assumée, derrière une infinie variété de lunettes de toutes couleurs, formes et types de monture. Cette campagne, qualifiée « d’audacieuse, moderne, dynamique et enjouée », garde le mot « plaisir » comme leitmotiv, toujours pour que ce plaisir dépasse la fonction.
Figure : Publicité rajeunie été 2023

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Le sourire est toujours omniprésent dans cette version modernisée, et le regard est taquin. Cette fois, le fond est uni (mais d’un bleu azur lumineux rappelant l’été), et c’est le personnage qui donne le ton en portant une tenue multi-accessoirisée (grosses boucles d’oreille et serre-tête à gauche, barbe et foulard coloré au centre, coiffure exotique, boucles et veste bicolore à droite), positionnant les lunettes en accessoires vestimentaires décoratifs comme les autres, et qui plus est, multiculturels et pour tous les âges (caucasienne à gauche, noir plus âgé au centre, asiatique à droite).
Un peu plus tard la même année, cet annonceur ajoute une dimension auditive à la dimension visuelle de son clip et parvient à accentuer l’effet « jeune » en convertissant une musique de fond classique (la danse hongroise N°5 de Brahms) en une version moderne hip-hop.

30D’autres marques érigent les lunettes au rang de signe extérieur de richesse, qu’il faut adopter pour assoir son prestige au même titre qu’une voiture ou une montre de renom, voire pour s’identifier aux stars. Extrait d’une plateforme pour lunettes de luxe10 : « Affirmez votre personnalité en chaussant vos lunettes de vue de luxe. Elles vous offrent un style particulièrement racé, signe de perfection et d’élégance raffinée …/… vous parent tels des bijoux …/… et vous propulsent sur le devant de la scène ».

31On voit dans ces blogs, clips et affiches que les lunettes font partie de l’attirail vestimentaire au même titre que le foulard ou les bijoux, et en tant que telles, projettent une identité visuelle, révélatrice de ce que les gens, plus ou moins consciemment, souhaitent refléter, une humeur positive, une attitude jeune, battante, rêveuse ou autre, s’inscrivant ainsi dans le visage comme un véritable indicateur de la personnalité.

Le monde de la politique

Les personnages politiques ne peuvent plus faire l’économie de s’exposer dans les médias s’ils veulent atteindre un auditoire large et divers. Comme le rappelle Delporte en citant Mistral dans l’avant-propos de son livre intitulé une histoire de séduction, « Que ce soit avec les femmes, avec les rois ou avec le peuple, qui veut régner doit plaire » (Delporte Christian 1958-..., 2011). Mayi, dans une thèse dédiée à la peopolisation des personnages politiques n’hésite pas à qualifier cette attitude « d’approche machiavélique qui les encourage à mettre en place des stratégies de séduction afin de susciter les fantasmes des publics dans le but ultime de conquérir le pouvoir et/ou de s’y maintenir » (Mayi, 2016). C’est ainsi que la première impression en politique est fermement liée à l’ascension du politicien (Do Ceu Jacinto, 2017). Les conseillers en communication politique ont vite compris le pouvoir de l’image. Considérant les responsables politiques comme des produits de consommation qu’il faut vendre, ils les incitent à soigner leur image, particulièrement quand ils (elles) passent à la télévision ou lorsqu’ils (elles) sont pris en photo pour les magazines. Pour captiver son public, l’homme et la femme politiques utilisent, en les optimisant, leurs qualités physiques telles que l’harmonie du visage ou l’élégance de leur tenue vestimentaire (Delporte Christian 1958-..., 2011; Eyries, 2012). Petit à petit, l’instrumentalisation des lunettes s’est invitée dans les stratégies de promotion électorale. Se moquant des pratiques mi- comiques, mi- manipulatrices de nos dirigeants, Franck Berteau narre « Le roman-photo des lunettes des politiques »11. Sont épinglés entres autres Nicolas Sarkozy et ses lunettes de marque qui renforcent son image « Bling Bling », et Eva Joly dont les mythiques petites lunettes rouges en forme de logo de campagne ou parfois « atomiques12 », seront troquées en 2012 dans son clip de campagne pour une monture verte, symbole de son engagement écologique.
Figure : Les lunettes symboliques d'Eva JolyImage 10000000000003D00000016280E2623BBA438F55.pngDans les deux photos, Eva Joly regarde par-dessus ses lunettes, probablement du fait de sa presbytie. Pourtant, elle semble exprimer deux sentiments opposés à travers elles. À gauche, du côté nucléaire, son regard est détaché de la caméra comme si elle s'en détournait, tandis qu'à droite, elle la regarde droit dans les yeux, montrant sa détermination à travers une distance sociale extrêmement courte, où les lunettes éco-colorées occupent stratégiquement une grande partie de l'espace.

32Jacques Chirac apparait en 1974 avec des lunettes à monture en écaille, critère de son sérieux, pour les abandonner en 1988 après son échec aux élections présidentielle, sur les conseils de sa fille Claude. Un article récent du même journal13 résume la carrière de Jacques Chirac par le prisme de ses lunettes « comme un effet de loupe sur les aléas de sa trajectoire ».

33« Dans les années 1960, les politiques sont mal à l’aise avec les lunettes, supposées vous vieillir avant l’âge. Qu’il les porte ou décide de s’en passer, ses lunettes ont scandé la carrière de Jacques Chirac (1932-2019). Pour asseoir sa crédibilité, dans les années 1960, le jeune loup de la politique au sourire carnassier adopte des montures austères. Le candidat à la présidence les délaisse ensuite pour adoucir son image. Mais le président vieillissant chausse de nouveau ses lunettes « à la Chirac »… pour se rajeunir...».   

34D’autres au contraire (moins calculateurs ?), ne maitrisent pas toujours leur image, notamment lorsqu’ils sont en direct à la télévision (Giasson, 2006). Le figaro14 épingle les quelques « secondes surréalistes », voire comiques, où Jean Castex lors d’une conférence de presse sur le sujet grave du covid, cherche ses lunettes alors qu’il les porte sur son nez, et conclut à un moment d'épuisement ou de stress « comme tout le monde ».
Figure  : Jean Castex premier ministre cherchant ses lunettes posées sur son nez15

Image 100000000000024E0000014C7432E7661507DFBF.pngDans cette vidéo notre ancien premier ministre semble avoir tellement intégré ses lunettes dans leur usage quotidien qu’il en perd la conscience physique, comme si celles-ci constituaient un prolongement de son corps.

35Au total, la communication des personnalités politiques par les lunettes, lorsqu’elle obéit à l’injonction de sérieux, ne choque pas les électeurs qui ne la perçoivent pas comme une tentative de manipulation, mais plutôt comme une cohérence, même lorsqu’ils sont prévenus de cet usage (Fleischmann et al., 2019). Cependant, la communication peut dans certains cas faire sourire. L’image des lunettes dans un environnement totalement maîtrisé comme les sites web des partis politiques reste à analyser.

Le monde académique

36Contrairement aux deux exemples précédents, les universitaires utilisent peu les médias pour valoriser leur image. Cela s'explique par le fait que la communication de cette catégorie professionnelle est davantage sous-tendue par un désir de valorisation institutionnelle que personnelle. Les enseignants chercheurs mobilisent moins de supports, pas de clips ni d’affiches, juste des albums de classe, des réseaux sociaux ou des sites web institutionnels. C'est peut-être la raison pour laquelle peu d'études se sont penchées sur le port de lunettes dans le monde universitaire. Comme ailleurs, on note dans les photos académiques une augmentation du port de lunettes avec l’âge (Ragan, 1982). En ce qui concerne le genre, l’analyse de contenu de deux corpus imposants, l’un de plus de 1200 photos d’annuaires scolaires (Ragan, 1982), l’autre de plus de 10 000 profiles recrutés sur trois sites de réseaux sociaux universitaires confirme une proportion significativement plus élevée d’hommes que de femmes portant des lunettes (Tsou et al., 2016). Cet accessoire reste cependant très présent dans l’imaginaire collectif, et rares sont les films ou les bandes dessinées où les professeurs ne sont pas représentés selon le stéréotype d’un homme à lunettes d’âge moyen.
Figure : Exemple de personnages de films représentant des professeurs

Image 10000000000003E2000001622B98C8D301959C97.pngDans le genre comique (deux photos de gauche), les lunettes accentuent l’air ahuri des protagonistes, et leur aspect physique décalé, au même titre que d’autres éléments de représentation visuelle, les dents avancées de J Lewis, ou la chevelure en bataille d’E Thomson. Dans le genre sérieux (photo de droite), le Pr Alvaro Morte, alias « El Professor », cerveau des braquages dans la série La casa de papel, présente plusieurs indicateurs liés à l’importance tels qu’un regard direct, la joue droite, une tenue formelle (costume cravate) et des lunettes (Fetscherin et al., 2020), mais ces dernières, de marque, sont décrites comme l’élément le plus stylé de son look16.

37Ce phénomène est accentué dans le style comique, sans doute parce que les lunettes sont immédiatement repérables dans un visage et finissent pas se substituer à l’énoncé de ce corps de métier, ce qui entretient la boucle. Le premier exemple est celui du Pr Foldingue créé en 1934 par André Daix17. Il est bien-sûr impossible d’être exhaustif, mais on peut citer dans la même veine le Pr Tournesol (dans Tintin)18, le Pr Maboule19 ou le Pr Jerry20, qui tous portent des lunettes. Dans le genre féminin beaucoup moins courant, on sourit à la transformation d’Emma Thomson qui interprète la Pr Sibylle Trelawney dans un épisode de Harry Potter (Harry Potter and the Prisoner of Azkaban) tourné en 199921. Dans les films sérieux, les lunettes véhiculent également ce stéréotype, mais de manière moins caricaturale, et c’est bien le registre classique de l’importance, la confiance en soi, la compétence qui est sollicité. On peut toutefois s’attendre à ce que cette association s’atténue avec le temps, du fait de l’intrusion de contrats publicitaires dans ce média.

38Au total, les lunettes restent un marqueur très fort du corps professoral, mais le message véhiculé varie en fonction du contexte et tend à devenir un objet esthétique et de modernité.

Discussion et conclusion

39Dans sa théorie sur les relations interpersonnelles, Goffman souligne l’importance de la « façade » dans, et par laquelle, un individu interagit avec un autre (Goffman, 1973). Cette façade est composée comme dans une mise en scène, d’une panoplie d’éléments contextuels incluant le décor choisi par « l’acteur », mais aussi d’éléments propres à son apparence physique, vêtements et accessoires, le tout participant à la construction de signes distinctifs de sa personnalité. Bien qu’ayant vécu à l’époque « pré-numérique », Goffman a aussi évoqué les interactions où les parties ne sont pas coprésentes. S’appuyant depuis sur son modèle, de nombreux chercheurs se sont penchés sur la relation particulière existant entre deux individus situés à distance, et ont analysé les deux facettes de cette relation, la présentation visuelle de soi du côté de l’émetteur et la perception de cette présentation du côté du récepteur. Cette revue a positionné les lunettes comme élément signifiant de la personnalité en abordant les deux points de vue en miroir : comment les lunettes sont perçues dans les médias et ont contribué au développement de stéréotypes sociologiques, et les retombées de ces croyances populaires sur l’usage plus ou moins délibéré des lunettes comme accessoire d’autopromotion ou au contraire de réserve.

40Nous concluons que l’image des lunettes est plurielle, globalement perçue négativement en ce qui concerne les traits de caractère liés à la timidité et l’amabilité ou l’attrait physique, surtout si c’est une femme qui les porte, mais reçue positivement lorsqu’il s’agit d’un contexte où l’intelligence et la performance sont à valoriser (sciences, politique notamment). Néanmoins, il semble exister un décalage entre la perception de l'attractivité personnelle par les femmes, qui est plus sévère que celle des hommes (Harris, 1991). De ce fait, les conseils qui foisonnent sur internet sont parfois contradictoires, mais confortent pour l’essentiel les clichés de sérieux et crédibilité pour les porteurs de lunettes, et d’obstacle à la séduction pour la gente féminine. Cette divergence peut s'expliquer par le fait que le stéréotype de l'attrait physique est plus fort que celui des traits sociaux tels que l'intelligence (Feingold, 1992). Ces codes, déjà fortement genrés comme nous l'avons vu, doivent également être considérés à la lumière d'autres facteurs épidémiologiques. Ils s’atténuent avec l’âge de l’observé et de l’observateur, et sont plus robustes dans notre monde occidental. Cependant, ces codes tendent à s’estomper avec l’arrivée massive dans tous les médias de la publicité qui met en avant l’esthétique des lunettes, tant pour les hommes que pour les femmes, jusqu’à leur conférer une aura de star à laquelle le porteur peut s’identifier. Les stars du petit et du grand écran relaient et renforcent ce message, surtout lorsque leur position les amène à invoquer le registre de l’importance (politiques ou académiques), et l’observateur s’en approprie jusqu’à en intégrer le sens. Ce constat fait écho au commentaire de Cardon «  La spécificité des technologies d'échanges numériques tient au fait qu'elles présentent des propriétés qui épousent de manière particulièrement efficace certains mouvements de notre société et qu'elles s'y sont si étroitement associés qu'elles semblent les provoquer autant que les traduire » (Cardon, 2008).

41Quel est l’avenir des lunettes ? Au-delà de leur finalité médicale et esthétique aujourd’hui relativement maîtrisée par l’utilisateur, il est raisonnable de penser que les lunettes, en devenant un objet de réalité augmentée, s’inviteront un jour comme troisième élément dans la relation observateur-observé. Cette vision du futur est un autre débat…



Bibliographie

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54Delporte Christian 1958-... (2011). Une histoire de la séduction politique. Paris : Flammarion, DL 2011.

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Notes

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2 https://www.snof.org/encyclopedie/les-lunettes-%C3%A0-travers-les-temps

3 https://www.snof.org/encyclopedie/les-lunettes-%C3%A0-travers-les-temps

4 Source Yougov et Statista, étude réalisée en 2019

5 Conversations de Goethe avec Eckermann, lundi 5 avril 18

6 Interview pour le journal le Monde, 2010.

7 https://blog.photofeeler.com/perfect-photo/; https://maphotoportrait.fr/conseils-de-bases-linkedin-cv/123-conseils-pour-photo-linkedin-faut-il-porter-ses-lunettes.html; https://blog.photofeeler.com/how-to-look-smart-in-photos/

8 https://www.afflelou.com/images/afflelou/france/cms/communiques/communique-de-presse-tchin-tchin-3-paires.pdf

9 https://www.afflelou.com/images/afflelou/france/cms/communiques/cp-tchin-tchin-ete-2022.pdf

10 https://www.mymonture.com/lunettes-de-vue/style/luxe

11 Le monde, Philippe Berteau, Le roman-photo des lunettes des politiques, publié le 08 août 2014

12 Le Blog de Daniel HUE le Crouycien Les lunettes atomiques d'Eva Joly, 24 novembre 2011

13 Le monde, Loïc Lusnia, Les lunettes de Jacques Chirac, « hublots de combat » d’une carrière long format. Publié le 28 juillet 2022

14 «Où sont mes lunettes ?» : ces quelques secondes surréalistes où Jean Castex les cherche alors qu'elles sont sur son nez (lefigaro.fr)

15 Conférence de presse autour du Covid. Crédit : gqmagazine.fr, Par Lucie Laffon 4 décembre 2020

16 https://www.serieously.com/la-casa-de-papel-deviens-style-professeur-lunettes-persol/

17 https://gallica.bnf.fr/html/und/litteratures/le-professeur-nimbus?mode=desktop

18 https://www.tintin.com/fr/characters/le-professeur-tournesol

19 https://www.cineserie.com/movies/269763/

20 https://www.spotern.com/fr/spot/movie/docteur-jerry-et-mister-love/78893/le-faux-dentier-du-professeur-julius-kelp-jerry-lewis-dans-docteur-jerry-et-mister-love

21 https://www.gazette-du-sorcier.com/les-grands-articles-de-la-gazette/opinions-analyses/trelawney-cassandre-de-son-epoque

Pour citer ce document

Isabelle Touitou, «Genre de lunettes et lunettes du genre dans les médias», French Journal For Media Research [en ligne], Browse this journal/Dans cette revue, 18/2023 Varia - autres articles en cours de publication, Revue de littérature, mis à jour le : 12/10/2023, URL : https://frenchjournalformediaresearch.com:443/lodel-1.0/main/index.php?id=2260.

Quelques mots à propos de :  Isabelle Touitou

Isabelle Touitou

Doctorante en Sciences de l'information et de la documentation

Laboratoire Corhis (EA 7400) Université Paul Valéry Montpellier 3

Montpellier, France

isabelle_touitou@hotmail.com

 

 

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