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Stéphane BILLIET (2017), Les relations « publics » ; refonder la confiance entre l’entreprise, les marques et leurs publics, 2ème édition, Paris : DUNOD, 249 p.
1Ce qui nous interpelle, en première vue de l’ouvrage de Stéphane BILLIET, est la transcription « les relations publics » dans le titre de l’ouvrage. S’agit-il d’une erreur d’orthographe ? Il ne s’agit pas uniquement d’un simple débat sur la transcription mais d’un nouveau courant de pensée qui retrace le champ des relations « publics ».
2Pourquoi alors « relations publics » et pas « relations publiques » ? C’était en 2011 dans une rencontre organisée par SYNTEC conseils en relations publiques, que la discussion était lancée pour adopter la nouvelle transcription. La réflexion sur cette problématique repose sur la traduction de l’anglo-saxon « public relations » vers le français qui signifie « les relations avec les publics », pour englober l’ensemble des publics de n’importe qu’elle entreprise. Cette nouvelle transcription vient donc inscrire la profession des RP dans un nouvel âge marqué essentiellement par l’avènement du numérique qui a bouleversé son exercice et a permis l’apparition de nouveaux publics. L’auteur, dans son introduction l’indique « blogueurs, twittos, instagrameurs…portés par la montée en puissance du web social, de nouveaux leaders d’opinion ne cessent d’apparaître dans le paysage médiatique » (P.01)
3Cet ouvrage s’inscrit dans le champ du marketing et de communication. L’auteur l’a organisé en trois parties. Dans la première partie, l’auteur s’est focalisé sur la relation entre l’entreprise et la société, en évoquant un nombre de concepts liés à la responsabilité sociale de l’entreprise. Il a évoqué un nouvel âge de relation entre les deux.
4Il est évident que toute entreprise soucieuse de se perfectionner a besoin de relations publiques. Toute sa démarche stratégique devrait reposer sur cette fonction. Elle en a également besoin pour se conformer à la société qui l’autorise à exercer ses activités à conditions de respecter les valeurs sociétales. C’est sa légitimité dans la société qui est remise en cause, puisqu’elle doit prendre en compte par une réflexion profonde son rôle dans le cadre du développement durable. C’est une sorte de contrat social qui régit la relation de l’entreprise à la société. Sur ce point l’auteur indique que « l’entreprise fonde sa légitimité sur son utilité sociale et la défend par son insertion responsable en société, sur la base d’un nouveau contrat social qui redéfinit ses droits et ses devoirs ». Il rajoute : « Le contrat social qui se réinvente entre l’entreprise et la société ne s’établit pas, comme hier, sur le travail d’abord, mais sur une relation plus complexe qui cherche à concilier création de richesse, progrès social et avenir environnemental » (P P.36-37)
5Nous comprenons que les responsabilités de l’entreprise ne cessent de se multiplier, sur le plan économique, légal, éthique et philanthropique, créant ainsi différents enjeux sociétaux auxquels les différentes entreprises sont appelées à faire face. Dans ce chapitre l’accent est mis sur la responsabilité sociétale de l’entreprise, une notion qui représente autant d’intérêt aux chercheurs qu’aux praticiens. En effet la notion de la responsabilité sociétale de l’entreprise demeure un facteur managérial qui mène l’entreprise vers la performance sociétale.
6Il est clair que l’entreprise aujourd’hui est confrontée à une réalité absolue, à savoir celle de la révision de son mode de gestion pour pouvoir s’insérer facilement dans la société. Les approches strictement économiques s’avèrent de plus en plus inutiles face à une dynamique sociale qui ouvre le champ à une gestion participative où l’intérêt général représente une des finalités les plus essentielles à l’entreprise. Aujourd’hui, elle se trouve devant un enjeu majeur qui fait pression, à savoir celui de concilier performance économique par la maximisation de son profil économique « réalisation de plus de gains », et contribution à la protection et la promotion des valeurs de la société. A cet effet ses actions doivent être prudentes pour qu’elles ne soient pas dérogatoires aux principes et aux valeurs de la société. Dans cette mouvance l’entreprise doit replacer l’humain dans son système managérial, dans son projet, faisant écho à la théorie des parties prenantes qui repose sur des considérations éthiques.
7Dans le deuxième chapitre, l’auteur qualifie les relations « publics » comme technologie sociale de réconciliation. En effet il revient sur le contexte historique de l’invention des relations « publics ». A l’origine, c’est au États-Unis qu’apparait la première génération de communicants d’entreprise au 19ème et 20ème siècle. Sous forme d’actions généralement exercées par d’anciens journalistes« ces press agents forment la première génération des professionnels des public relations » (P. 52).« Des agents de presse/ promotion » comme les a qualifiés James Grunig dans sa modélisation. Des praticiens qui cherchent une couverture favorable à l’entreprise, et par conséquent la promotion de son image. Tels sont quelques principes phares de sa déclaration, mais cette vision humaniste des relations « publics » ne cesse d’être confrontée aux impératifs économiques de l’entreprise. Le relationniste de l’entreprise se trouve souvent dans une position inconfortable face aux objectifs de l’entreprise notamment dans le coté économique.
8Il existe de nombreuses définitions des relations « publics », des centaines leur ont été données depuis leur apparition. Il est important de noter que les relations « publics » agissent sur les opinions, les attitudes et les comportements des publics pour créer un climat de confiance et arriver à un consensus mutuel entre les deux parties en vue d’établir des relations durables. Elle résulte de l’appréciation de la proposition de l’entreprise et de sa ou de ses marques par l’opinion » (p. 66-67).
9Dans le troisième chapitre, l’auteur évoque la valeur ajoutée des relations « publics ». Sociologiquement, la variable « relation » revêt une importance capitale dans la société. Il ne suffit pas de transmettre l’information pour qualifier un lien de relation. Bien au contraire, cette relation devrait se baser non seulementsur l’échange, mais aussi sur la compréhension mutuelle entre les individus et entres les groupes. L’auteur présente le schéma de base de la communication, il en indique l’existence de co-émetteurs, ceux qui sont des alliés de l’entreprise, qui l’aident à mieux véhiculer et à faciliter la compréhension de ses messages.
10Tout le travail des relations « publics » repose sur l’opinion. Avec le développement technologique et l’apparition de nouveaux médias (numériques), de nouveaux leaders d’opinion ont émergé (les e-influencers), ces leaders d’opinions sur la toile qui créent le buzz en ligne, peuvent véhiculer facilement les messages d’une entreprise donnée. « Le digital a naturellement élargi la palette des relations « publics » à la gestion de la relation avec les « e-fluencers »et au community management. Gérer la relation interactive qui s’établit sur le web entre les émetteurs de communication et leurs audiences est devenu une activité centrale des professionnels des relations publics » (P. 81), tout ce travail consiste à gérer la réputation de l’entreprise, l’auteur la considère comme une valeur qui crée de la valeur.
11Le quatrième chapitre est réservé au sujet du processus des relations « publics ». L’auteur indique que cette fonction intervient dans un champ multivarié. Elle recouvre en effet plusieurs activités au service de l’entreprise, des activités qui relèvent soit de la communication média soit de la communication hors-médias pour de multiples finalités. Elle communique sur le corporate et l’institutionnel, les marques et les produits, au moment des crises, lors des événements…etc. Cette panoplie d’activités exige de la part des relationnistes de réfléchir à une stratégie basée sur une planification préalable rigoureuse et sur des bases scientifiques. La méthode RACE développée principalement dans le cadre de la fonction des relations « publics », consiste à faire des recherches, planifier un plan d’actions, le communiquer aux différentes parties concernées et faire l’évaluation à la fin de la démarche. (p. 134-135) En plus de ladite méthode, COMPASS est considérée une autre méthode qui permet aux relationnistes de planifier et d’élaborer un plan de relations « publics » pour pouvoir assurer la cohérence et l’efficacité des actions à entreprendre dans le cadre de la réalisation des activités de relations « publics ». « Pour inscrire la démarche de planification puis l’exécution des campagnes dans un cadre rigoureux, la plupart des grandes agences de relations ont formalisé une méthodologie. Le réseau international Hill+KnowltonStrategies a élaboré « COMPASS », une méthodologie qui se présente sous la forme de six champs de questionnement : Now, What, Show, Execute et Evaluate ». (P. 137) L’efficacité des programmes des relations « publics » doit s’inscrire sur une démarche de réflexion stratégique.
12La fonction des relations « publics » s’est dotée d’un arsenal inestimable de techniques pour assurer l’efficacité de ses programmes. Ce progrès technique dû au développement technologique doit inévitablement être accompagné par des pratiques plus modernes.
13L’auteur revient dans ce cinquième chapitre sur le devenir des publics dans cette nouvelle dynamique. Nous ne pouvons continuer d’exercer la fonction des relations « publics » comme autrefois, les publics d’hier, qualifiés de passifs ne sont pas ceux d’aujourd’hui, ils sont devenus plus actifs, des acteurs à part entière, des parties prenantes qui conditionnent l’activité de l’entreprise voire même sa continuité. Nous sommes devant de modalités relationnelles qui favorisent l’émergence de nouvelles pratiques avec les parties prenantes de l’entreprise.« L’usage du terme « parties prenantes » oblige à repenser la place et le fonctionnement de la communication dans l’entreprise ». (P. 152)
14Le sixième chapitre évoque le pilotage et la mesure d’efficacité des relations « publics ». Tout projet ou programme pour qu’il réussisse doit passer par l’évaluation, cette dernière faite en amont et en aval. Le pilotage permet de suivre de près l’exécution des actions et d’intervenir pour modifier le plan, si la situation l’exige, à l’aide de tableaux de bord en se dotant d’outils de mesure. L’évaluation est la boucle de toute démarche stratégique, visant à améliorer et assurer l’efficacité. « L’évaluation est traditionnellement envisagée à la fin du processus de communication, comme une conclusion quantitative et éventuellement qualitative, de la démarche. Il serait plus utile, au contraire, de penser la mesure comme une aide à la décision et un outil de pilotage des actions » (p. 187)
15Dans la dernière partie de l’ouvrage, l’auteur traite de la pratique contemporaine des relations publiques. Nul ne peut nier la contribution des relations « publics » dans les entreprises et dans les sociétés. Il est évident de rappeler que grâce à cette fonction, les entreprises s’intègrent et s’adaptent très facilement dans la société. L’entreprise doit avoir un comportement exemplaire, en respectant les valeurs de la société et travailler à les promouvoir. Avec la mondialisation qui a donné naissance à une société connectée, les relations « publics » devront faire face à de nouveaux enjeux à savoir celui de la sincérité, qui pousse l’entreprise à être transparente et à divulguer toutes les informations, les concernant, en termes plus simples « communiquer », échanger avec ses parties prenantes sur des sujets d’intérêts commun, et entreprendre un dialogue coopératif, et être en proximité avec les parties prenantes.
16Nous pouvons dire que la communication de l’entreprise se réinvente avec les nouvelles pratiques des relations « publics », notamment avec le développement de la communication numérique. Les actions des relations « publics » ne sont pas restées dans la logique informationnelle, mais plutôt dans une démarche communicationnelle et relationnelle, où l’entreprise cherche à comprendre le récepteur. Cette réalité bouleversante de l’exercice des relations « publics » demande à repenser le système communicationnel de l’entreprise, « les praticiens doivent revoir leur pratique ! ils doivent guérir leur obsession de l’image et explorer des voies plus participatives » (P. 231)
17L’auteur, à travers la nouvelle édition de son ouvrage, a clarifié la question des relations « publics ». L’intérêt de l’ouvrage réside aussi dans l’expérience des praticiens et les avis des experts nous aidant à mieux comprendre le concept et à le contextualiser dans le monde pratique.
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