French Journal For Media Research

Ana-Maria Cozma et Milla Luodonpää-Manni

« Des journalistes francais dénoncer la propagande, lol. » : représentations des médias traditionnels véhiculées sur Twitter par des usagers s’intéressant à l’actualité politique

Résumé

Cette étude s’intéresse à la manière dont dix utilisateurs Twitter préoccupés par l’actualité politique se rapportent aux médias traditionnels, dans le cadre des élections françaises présidentielles et législatives de 2017. Basée sur un corpus de tweets publiés entre janvier-juin 2017, l’analyse quantitative et qualitative menée permet d’identifier les acteurs médiatiques privilégiés par les twitteurs étudiés, leurs attitudes envers ces acteurs, ainsi que leurs interactions avec les médias traditionnels telles qu’elles sont évoquées dans le corpus.

Abstract

This study focuses on the way Twitter users who are preoccupied with politics relate to traditional media during the French presidential and legislative elections 2017. Our quantitative and qualitative analyses of a collection of tweets published from January to June 2017 allow us to the identify media actors which are mentioned in the tweets of ten people interested in politics, the twitters’ attitudes toward these actors, as well as the nature of interaction between the twitters and the traditional media as represented in our corpus.

Full text

Introduction 

1Depuis une décennie, les médias sociaux (Facebook, Twitter, Instagram etc.) et leur usage accru au sein des médias traditionnels (télévision, radio, presse) ont suscité de nombreuses recherches sur l’impact des médias sociaux sur la télévision (voir par ex. Harrington, 2013 ; Larsson, Kalsnes et Christensen, 2017) et le journalisme traditionnel (par ex. Hermida, 2010, 2013 ; Pignard-Cheynel et Sebbah 2012). Les médias sociaux n’apportent pas uniquement une forme d’interaction et une instantanéité nouvelles pour les médias traditionnels, mais ils leur fournissent également une source d’information (Broersma et Graham, 2012, 2013 ; Paulussen et Harder, 2014 ; Bane, 2017) et un marqueur de tendances (Bane, 2017) important. Les journalistes professionnels s’appuient régulièrement sur les médias sociaux dans leur travail (voir Chadwick, 2013 ; Paulussen et Harder, 2014 ; Neuberger, von Hofe et Nuernbergk, 2013) et les technologies des médias sociaux sont de plus en plus intégrées aux contenus des médias traditionnels. Cette hybridation médiatique est en train de changer profondément la structure des médias de masse, la nature des auditoires et leur façon de consommer les médias (voir Chadwick, 2013).

2L’hybridation des médias a provoqué une ample discussion qui tourne autour de l’interaction entre les médias traditionnels et les médias sociaux. Cette discussion se concentre davantage sur une des facettes de l’interaction, à savoir la place des réseaux sociaux dans les médias traditionnels et les attitudes des journalistes envers les médias sociaux (Chorley et Mottershead, 2016). En revanche, on a beaucoup moins étudié l’hybridation des médias depuis la perspective de l’utilisateur des médias sociaux. En ce qui concerne le réseau social Twitter, il existe des travaux sur les comportements des utilisateurs Twitter, notamment sur l’interaction des twitteurs avec leur auditoire (Marwick et Boyd, 2011 ; Zappavigna, 2012 ; Papacharissi, 2015), sur les différents sujets de discussion dans la presse versus Twitter (Zhao et al., 2011 ; Ausserhofer et Maireder, 2013), sur l’usage des hashtags (Bastos, Raimundo et Travitzki, 2013 ; Scott, 2015 ; Mercier, 2018),  sur les fonctions des retweets (Boyd, Golder et Lotan, 2010 ; Ahn, et Park, 2015), sur les fonctions de l’image dans les tweets (Toullec et Simon, 2018), etc. D’autre part, depuis la campagne présidentielle de 2008 aux États-Unis, qui a été marquée par le rôle central joué par Twitter en politique, l’usage de ce média social pendant les campagnes électorales a donné lieu à toute une série d’études. Ces études ont porté, entre autres, sur l’usage de Twitter comme outil de la campagne électorale (Vergeer et Hermans, 2013), sur la médiatisation de la politique (Jungherr, Schoen et Jürgens, 2016) et sur la façon dont le contenu de ce média social est exploité dans les médias traditionnels (Broersma et Graham, 2012 ; Conway, Kenski et Wang, 2015)Department of Communication, University of Arizona, 1103 E University BlvdTucson, AZ 85721Department of Communication, University of Arizona, 1103 E University BlvdTucson, AZ 85721. Toutefois, à notre connaissance, la manière dont les utilisateurs Twitter parlent des médias traditionnels dans le contexte des élections n’a pas été étudiée jusque-là.

3Dans la présente étude, nous nous penchons sur les représentations des médias traditionnels telles qu’elles sont véhiculées sur Twitter par des usagers engagés politiquement ou s’intéressant à l’actualité politique. Outre leur militantisme ou intérêt pour la politique, les dix comptes Twitter choisis ont aussi en commun le fait d’avoir attiré l’attention des journaux traditionnels, qui les ont mentionnés dans leurs articles. Une des idées à la base de la constitution de notre corpus est, en effet, cette forme d’interaction qui existe entre les médias traditionnels et les médias sociaux qui consiste dans le fait que les premiers parlent des derniers, qui, à leur tour, parlent des premiers. Ainsi, notre corpus est constitué de plus de 1 000 tweets contenant des références aux différents acteurs des médias traditionnels (journaux, journalistes, chaines de télévision et de radio, émissions spécifiques de ces derniers, etc.) sur une période allant de début janvier à fin juin 2017, période couvrant deux campagnes électorales en France. Dans ces tweets, les dix utilisateurs font des commentaires liés aux médias ou aux journalistes, affichent diverses attitudes face aux médias, allant parfois jusqu’à les dénigrer, voire les injurier ; ils mentionnent aussi le fait que les médias parlent d’eux. Une analyse de ces tweets nous permettra de mieux comprendre le comportement et la vision des utilisateurs Twitter préoccupés par l’actualité politique, ainsi que de répondre aux questions de recherche suivantes :

4Q1 : De quelle manière les dix twitteurs – en tant qu’usagers s’intéressant à l’actualité politique – parlent-ils des médias, des journalistes et de l’information ? Quels sont les acteurs des médias traditionnels mentionnés le plus dans leurs tweets ? Quels sont les rôles, actions et attributs associés à ces acteurs médiatiques ?

5Q2 : Quelles sont les différences entre les twitteurs du corpus pour ce qui est de leurs attitudes envers les acteurs médiatiques ? Quelles sont les interactions qu’ils envisagent entre eux-mêmes et les médias telles qu’elles se dégagent de leurs tweets ?

6Pour nous assurer de l’intensité des discussions sur Twitter, nous avons choisi de capturer les tweets pendant la période électorale de la première moitié de 2017 : les pré-élections, élections et post-élections présidentielles et législatives françaises en 2017. Les élections présidentielles, notamment, ont été caractérisées par la popularité dans les sondages de la candidate du Front national, Marine Le Pen, ainsi que par la lutte contre les fausses informations, qui est un sujet dans l’air du temps depuis la campagne présidentielle américaine de 2016. La campagne de Le Pen a été ouvertement soutenue par un groupe hétérogène consistant d’activistes d’extrême droite sur Twitter, dont nous avons inclus quelques comptes dans la présente recherche. Outre les activistes de l’extrême droite, les « patriotes », nous analysons des comptes appartenant à des supporteurs de la droite (notamment de François Fillon, candidat du parti Les Républicains) et de l’extrême gauche (La France insoumise de Jean-Luc Mélenchon), ainsi que le compte d’un utilisateur non militant mais qui s’intéresse à l’actualité politique. Étant donné ce contexte du corpus, les hypothèses que nous pouvons faire sont les suivantes :

7H1 : Les dix utilisateurs Twitter, et, parmi eux, tout particulièrement les activistes, font référence aux acteurs médiatiques comme source de l’information tout en les accusant parfois de partialité.

8H2 : Les activistes d’extrême droite dénigrent les médias ou affichent dans leurs tweets une attitude négative face aux médias, et ils le font plus souvent que les autres activistes.

9La présente étude vise à compléter les recherches existantes portant sur les modèles de comportement des activistes Twitter. Une telle recherche est importante parce que, grâce à l’accès libre et facile de cette technologie, un utilisateur Twitter préoccupé par l’actualité politique peut, dans certains cas, atteindre un public aussi large que celui des médias traditionnels, ce qui rend Twitter un moyen de communication puissant.

Présentation du corpus et méthode d’analyse

10Le corpus de tweets sur lequel se base la présente étude a été constitué en plusieurs étapes, en tenant compte de l’interaction entre les médias traditionnels et les médias sociaux, représentés ici par Twitter. Dans un premier temps, nous avons identifié, dans quatre journaux français (Le Monde, Le Figaro, Libération et 20 minutes), les comptes d’utilisateurs ordinaires de Twitter qui ont été mentionnés dans le texte des articles durant l’année 2017 ; nous n’avons donc pas retenu les comptes figurant uniquement dans des copies d’écran. Nous nous sommes intéressées principalement au fait qu’il s’agissait d’internautes lambda et nous avons laissé de côté les célébrités, personnalités politiques ou autres personnages ayant un quelconque statut institutionnel. Dans un deuxième temps, pour chacun des comptes Twitter retenus, nous avons recueilli les tweets publiés durant la première moitié de l’année 2017. Cette période a été choisie parce qu’elle correspond à deux campagnes électorales – la présidentielle d’avril-mai 2017 et les législatives du mois de juin – et qu’elle est donc propice à la manifestation des représentations des médias traditionnels chez les usagers Twitter s’intéressant à l’actualité politique. Cependant, comme une partie des comptes Twitter de notre liste n’étaient plus disponibles au moment où la capture des tweets a été réalisée1, car supprimés ou devenus inaccessibles pour la période qui nous intéressait, nous avons obtenu un premier corpus contenant treize comptes Twitter. Après élimination des comptes qui fonctionnaient comme des doublons, c’est-à-dire qui sont gérés par la même personne, qui publie les mêmes tweets sous deux identifiants différents, nous avons obtenu un corpus de 12 476 tweets, issus de dix comptes Twitter d’activité inégale : le nombre de tweets par compte varie de 13 à 2 360, et la date à laquelle nous avons pu remonter au moment de la capture des tweets varie du 1er janvier au 22 mai 2017.

11Dans le corpus ainsi établi, nous pouvons identifier plusieurs types de comptes Twitter2 :

  • des comptes dédiés principalement à la politique, qu’il s’agisse de la voix d’un groupe ou d’un individu militants, se disant patriotes, pour ceux qui sont à l’extrême droite (@1, @2 @3 @4) et se disant opposés à la gauche pour les autres (@5, @6, @7, @8) ;

  • un compte, parmi ceux qui précèdent, qui est dédié principalement à diffuser sur Twitter les publications du site web de l’auteur (@6) ;

  • un compte dédié entièrement à la véridicité des informations publiées dans la presse sur La France insoumise, compte actif du 11 février au 29 mars 2017 (@9) ;

  • le compte personnel d’une étudiante, où la politique est un sujet parmi bien d’autres (@10).

12Trois de ces comptes affichent explicitement un rapport aux médias traditionnels dans leur profil : l’un parle de vérification des informations données par la presse, l’autre du fait que les médias nous manipulent et le dernier du fait que les médias soutiennent le candidat Macron.

13Pour notre corpus final, nous avons sélectionné – sur la base du champ lexical des médias et de leur champ référentiel – uniquement les tweets dans lesquels il était fait mention explicitement d’un média traditionnel, à savoir les tweets où figuraient les mots « journaliste », « rédacteur », « médias », « presse », « journal », « radio », « télé », etc., ou des noms de journalistes et de médias : Ruquier, Salamé, El Khrief ; Le Figaro, BFMTV, Europe1, etc. La présence des médias traditionnels dans les tweets est aussi repérable à partir de termes qui renvoient à des supports, des genres, des lieux ou modalités de diffusion, etc. : « une », « vidéo », « article », « interview », « sur le plateau », « en direct », « split-screen », par exemple. De manière générale, les tweets ainsi retenus font intervenir plusieurs de ces mots/noms liés aux médias traditionnels, mais il existe aussi des cas où la présence de mots isolés tels « article », « vidéo », « reportage » ne suffit pas pour identifier un rapport aux médias traditionnels – et ce genre de tweet n’a pas été pris en compte. En revanche, nous avons repéré des tweets où une anaphore pronominale permettait d’identifier une référence aux médias traditionnels. La sélection des tweets pour le corpus final a été réalisée manuellement, à partir d’une liste de mots-clés non exhaustive, destinée à orienter la recherche plutôt qu’à la délimiter et qui a été complétée au fur et à mesure de cette recherche. Au final, le nombre des tweets qui seront analysés dans cet article s’élève à 1 016, répartis sur l’ensemble des dix comptes Twitter comme il suit.

Tableau 1. Vue d’ensemble du corpus

img-1.png

14Nous avons conservé tous les tweets des comptes où il était question des médias traditionnels, y compris les réponses données à d’autres et les retweets d’autres twitteurs – qui sont souvent, eux, des célébrités ou des personnalités politiques –, voire les retweets de ses propres tweets, lorsqu’un twitteur fait usage de cette pratique. Cela dans la mesure où nous estimons que l’information récupérée dans le fil d’actualités ou ailleurs sur le net et partagée par l’utilisateur Twitter est révélatrice de sa vision et de ses attitudes envers les médias au même titre que les tweets qu’il formule soi-même.

15Pour ce qui est de la méthode, elle sera à la fois quantitative et qualitative. La première étape de l’analyse sera purement quantitative et permettra d’identifier les préférences des activistes Twitter de notre corpus à partir des fréquences avec lesquelles ils mentionnent les acteurs médiatiques dans leurs tweets. En un deuxième temps, en cherchant à identifier ce qui se dit à propos de ces acteurs médiatiques, nous effectuerons une analyse de contenu qui nous mènera à poser les catégories nécessaires pour décrire la manière dont les twitteurs se représentent les médias traditionnels. Ces catégories seront ensuite évaluées quant à leurs poids respectifs dans la représentation des médias chez les twitteurs. Enfin, la troisième étape consistera en une analyse qualitative lors de laquelle nous discuterons le discours médiatique sous l’angle des interactions évoquées dans les tweets entre les activistes Twitter et les acteurs médiatiques. Ces interactions pourront être de nature symétrique/réciproque ou asymétrique, lorsque l’un des camps médiatiques est affecté par l’autre sans l’affecter à son tour.

Analyse

16Les représentations des médias traditionnelstelles qu’elles se réalisent chez les dix twitteurs que nous avons sélectionnés seront abordées de trois manières différentes : A) à travers les acteurs mentionnés (étude quantitative), B) à travers ce qui est dit par rapport à ces acteurs (analyse de contenu) et C) à travers l’interaction avec les médias traditionnels évoqués par les utilisateurs Twitter (analyse qualitative).

Les acteurs médiatiques mentionnés par les dix twitteurs

17Une première facette des représentations des médias traditionnels chez les dix twitteurs auxquels nous nous intéressons concerne les acteurs médiatiques mentionnés dans leurs tweets. Dans les 1 016 tweets de notre corpus, nous avons pu repérer 1 145 occurrences de noms communs et propres désignant des acteurs des médias traditionnels. La nature et la fréquence de ces noms d’acteurs médiatiques sont susceptibles de donner des indications sur la place que les médias traditionnels occupent dans l’univers des twitteurs. Par acteurs médiatiques, nous entendons, au sens large, toute instance individuelle ou collective qui joue un rôle dans la production et distribution des médias traditionnels. En l’occurrence, les noms d’acteurs figurant dans le corpus appartiennent à cinq catégories (les journalistes, la presse écrite, la télévision, la radio, les patrons de presse), auxquelles il faut ajouter la catégorie très générale « médias », évoquée souvent par les internautes. Chacune de ces six catégories se manifeste dans les tweets soit par des emplois génériques des noms désignant la catégorie, soit par des emplois spécifiques de ces noms et par des noms propres. Par exemple, pour la catégorie des journalistes, on rencontre des mots tels chroniqueur, rédacteur, reporter, éditorialiste, pigiste, ainsi que le mot journaliste, qui est d’emploi extrêmement fréquent ; des noms de journalistes sont également mentionnés. Les autres acteurs possibles ont été peu voire pas du tout mentionnés : trois occurrences de rédactions et une de crieur de journaux.

18Si à cette étape de notre analyse nous ne cherchons pas à voir quelles sont les attitudes des activistes Twitter vis-à-vis des médias traditionnels, il nous semble important de distinguer emploi générique et emploi spécifique de ces catégories, car c’est un aspect révélateur du rapport aux médias traditionnels dans la mesure où dans les énoncés génériques les stéréotypes et attitudes sont affichés avec plus de force. Les chiffres obtenus (rappelons que tous les tweets sont pris en compte, y compris les retweets et auto-retweets) montrent que la catégorie des journalistes est la plus fréquemment évoquée (27,38 %), suivie de près par la catégorie des médias (25,46 %). La presse et la télévision sont également très présentes, tandis que la radio est peu mentionnée et la catégorie patron de presse n’est représentative que chez trois des twitteurs. Vu les pratiques contemporaines qui font que la télévision, la presse et les journalistes en général insèrent des tweets dans leur contenu médiatique – sujet que nous avons abordé dans l’introduction –, on pourrait s’attendre à ce que les twitteurs soient en interaction avec ces catégories d’acteurs médiatiques. Pour la radio, transmise sous forme audio, l’usage des tweets n’est pas aussi évident même si des tweets sont cités dans certains programmes radio aussi.

19Sur les six catégories d’acteurs médiatiques, les deux premières figurent dans le corpus en emploi majoritairement générique et les autres en emploi majoritairement spécifique. Cela résulte globalement en un équilibre pour l’ensemble du corpus (49,08 % d’emplois génériques contre 50,92 % d’emplois spécifiques), alors qu’il y a des différences d’un compte Twitter à l’autre, comme on peut le voir dans les dernières lignes du tableau suivant. Ces traits caractéristiques sont visibles dans la dernière ligne du tableau ci-dessous, où figurent en premier lieu le nombre total d’occurrences chez chaque twitteur ainsi que le poids de ces occurrences par rapport à l’ensemble du corpus. Y figurent ensuite le nombre d’occurrences génériques et spécifiques, accompagnées des pourcentages reflétant la proportion générique/spécifique chez chaque twitteur.

Tableau 2. Les acteurs médiatiques mentionnés dans les tweets

img-2.png

20Deux comptes emploient autant les mentions spécifiques que généralisantes (@1 et @3) et un compte fonctionne 100 % sur des emplois spécifiques (@9). Pour les sept autres comptes, il est intéressant d’observer qu’ils privilégient tous l’emploi spécifique pour les catégories ‘presse’, ‘télévision’ et ‘radio’, qu’ils mentionnent tous les ‘médias’ au sens générique, et qu’il y a une corrélation entre la manière de mentionner la catégorie ‘journalistes’ et la dominante spécifique ou générique dans la mention des acteurs médiatiques. En effet, @5, @6 et @7, qui privilégient l’emploi générique de la catégorie ‘journaliste’, sont également ceux qui privilégient globalement la mention générique des sources (respectivement 62 %, 61 % et 57 % des mentions qu’ils font sont de nature générique). Cela revient à dire qu’il suffit de regarder de près la mention qui est faite des deux premières catégories pour savoir si un twitteur privilégie les propos généralisants. Un cas à part est représenté par @10, qui ne fait pas de généralisation dans la catégorie « médias » et chez qui la mention des acteurs médiatiques se fait à 85 % de manière spécifique, ce qui confirme l’affirmation que nous venons de faire. La prédilection pour l’emploi généralisant chez les twitteurs activistes n’est pas étonnante, vu sa force discursive et argumentative. En effet, un énoncé généralisant a comme particularité d’être vrai pour tout membre de la catégorie, d’être toujours vrai et d’être nécessairement vrai (Ali Bouacha, 1993 : § 30-31). Les représentations et stéréotypes ainsi véhiculés s’en trouvent renforcés.

21Si l’on regarde maintenant les noms propres mentionnés par l’ensemble des dix twitteurs afin de voir quels sont les acteurs spécifiques concrets les plus fréquents, nous aboutissons à la liste suivante, organisée par ordre décroissant du nombre de twitteurs qui y font référence. Nous retrouvons dans cette liste quatre des catégories analysées ci-dessus, mais il faut remarquer qu’en termes de fréquence, c’est la télévision qui arrive en premier, avec le plus grand nombre de mentions (195 au total), suivie de la presse écrite (167 mentions). Ce sont également deux chaînes de télévision, BFMTV et France2, qui enregistrent la plus grande fréquence dans le corpus (mentionnées chez 8 twitteurs, avec respectivement 81 et 18 occurrences au total sur l’ensemble du corpus). Suivent Le Figaro et TF1 (avec 7 twitteurs qui en parlent), Le Canard enchaîné, Le Monde et Mediapart (chez 6 twitteurs), Libération, LCI et France Info (chez 5 twitteurs).

Tableau 3. Fréquence et diversité des actants médiatiques

img-3.png

22En termes de diversité, c’est dans la catégorie des journalistes, tous types de médias confondus, que nous trouvons le plus de noms mentionnés (au nombre de 35, même si 24 de ces noms ne sont mentionnés qu’une fois par un twitteur), mais l’écart avec la presse écrite et la télévision n’est pas grand. La diversité est moindre pour les chaînes et émissions de radio, dans le prolongement des résultats présentés dans le tableau 2. Bien entendu, les caractéristiques de ces acteurs (orientation politique, présence sur le net, réputation, etc.) permettraient d’affiner l’interprétation, mais les justifications de cette diversité et la nature ou orientation des acteurs médiatiques cités débordent les objectifs que nous nous sommes fixés et mériteraient de faire l’objet d’une étude à part.

De quelle manière les dix twitteurs parlent-ils des médias traditionnels ?

23L’inventaire des acteurs médiatiques mentionnés dans le corpus a permis de comprendre le rapport des dix twitteurs aux médias traditionnels : la tendance à généraliser leur discours portant sur les médias, la fréquence des acteurs dans ces discours, la diversité et la mention d’acteurs spécifiques. Ce rapport estimé en termes quantitatifs, de tendance et de fréquence, exige d’être complété par des données portant sur ce que les dix twitteurs affirment à propos des médias traditionnels. Dans cette deuxième étape de l’analyse, nous visons à identifier quelles représentations des médias les twitteurs activistes créent dans leurs tweets. Quels sont les rôles, actions, attitudes et attributs qu’ils associent aux différents acteurs médiatiques ?

24La réponse à ces questions sera donnée à partir d’une analyse de contenu qui a rendu possible l’identification de 24 catégories réunies autour de quatre grands axes thématiques : (1) axe du faire savoir ; (2) axe de l’agir ; (3) axe du subi ; (4) axe de l’être. L’analyse que nous en ferons vaut pour l’ensemble des acteurs médiatiques, qui seront donc traités, à cette étape, en faisant abstraction de la diversité présentée supra. Certaines des catégories sont très rapprochées, comme nous le verrons par la suite, et pourraient être regroupées différemment. Cependant, une catégorisation plus nuancée est plus judicieuse si l’on veut comparer les représentations des médias chez les différents twitteurs. De plus, les catégories seront envisagées en termes d’évaluation positive ou négative, étant donné que l’analyse de contenu a révélé une forte polarisation de la plupart des catégories, aspect qui ne peut donc être ignoré. Quant à la comparaison visée ici, elle portera sur les utilisateurs Twitteur et traitera les activistes patriotes d’extrême droite de manière groupée (@1, @2 @3 @4), tout comme ceux s’opposant à la gauche seront pris comme un tout (@5, @6, @7, @8). Cela mène à quatre sous-ensembles à comparer : i) les tweets des militants d’extrême droite, les patriotes ii) ceux des activistes opposés à la gauche, iii) le compte Twitter destiné à traquer les fausses informations et iv) celui d’une étudiante. Les nombres fournis pour chaque catégorie correspondent à des occurrences et à des pourcentages calculés pour chaque sous-ensemble (pourcentages rapportés à 182 occurrences pour l’extrême droite, à 715 occurrences pour l’anti-gauche, à 9 occurrences pour le compte @9 traquant les fausses informations, et à 38 occurrences pour le compte @10  de l’étudiante).

Axe du faire savoir

25Les neuf catégories de ce premier axe sont directement liées au rôle des médias d’informer et se manifestent dans le corpus par des mots et expressions tels :

  • information, désinformation, censure : informer || désinformer, manipuler, mentir, tromper, nier, invention, intox, fake news, fabriquer les news, fausse nouvelles, rumeur, bruits, insinuation, truqueur, tricher, bidonner || censurer, sélectionner, empêcher de dire, verrouiller les commentaires, supprimer, intervenir pour faire retirer, interdire, etc. ;

  • erreurs, rectifications : dérapages, erreurs, traquer les fake news || corriger, rectifier, démentir, etc. ;

  • dire la vérité, prétendre : censé vouloir dire la vérité || ne pas vérifier ses sources, avoir peur de dire la vérité, narration, raconter des conneries, faire croire, présenter comme, prétendre, être prêt à ne plus prétendre, essayer de faire passer pour, se prétendre, faire genre, déni ;

  • publier, traiter, parler de, ne pas parler, taire : publier, relayer, diffuser, traiter, parler de, commentaire || (décider de) ne pas publier, ne rien sortir, refuser de faire passer, ne pas relayer, ne pas reprendre, ne pas retransmettre, sans donner de détails, en parler cinq secondes, omettre d’en parler, parler de la pluie et du beau temps, parler costard, plus un mot sur, pas un mot, aucun mot, (se) taire, ne rien dire, ne pas évoquer, ne pas communiquer, silence, aucun commentaire, aucune réaction ;

  • dénoncer, couvrir : dénoncer || couvrir quelqu’un, excuser, ne pas exposer les casseroles, pas intéressés par un scandale, indulgence envers ;

  • relever, étouffer : enquête, regards inquisiteurs, sondage, poser des questions, interroger, prouver, révéler, divulguer, démasquer, dévoiler || ne pas enquêter, faire confiance, se contenter d’une déclaration les yeux dans les yeux, cacher qqch/les preuves/les révélations/les informations, étouffer l’affaire ; etc. ;

  • objectivité, partialité : objective, impartialité, information neutre || manque d’objectivité, pantins, partialité, piétiner la neutralité journalistique, etc. ;

  • savoir, découvrir, se rendre compte : savoir (parfaitement), avoir reçu les infos, disposer de nombreuses/avoir toutes les informations, avoir accès au pv de l’enquête, découvrir des documents || se rendre compte de, tout comprendre (ironique) ;

  • dire et verbes de parole : dire, désigner le coupable, résumer l’affaire, affirmer, confirmer, annoncer, afficher, expliquer, décrire, suggérer de, évoquer, rappeler, marteler, (oser) citer || ne pas vouloir dire.

26Il s’agit de l’axe le plus saillant chez les utilisateurs Twitter, voire du seul manifeste dans le cas du compte Twitter @9 destiné à traquer et faire corriger les fausses informations. En effet, @9 s’intéresse uniquement au rôle d’informer des médias, avec 55,56 % d’expressions relevant de la désinformation, 22,22 % relevant de l’erreur et 22,22 % de la rectification. Il est pratiquement le seul à s’intéresser aux erreurs des médias et à exiger leur correction, et il est également celui qui insiste le plus sur la désinformation3, loin devant les activistes (13,75 % chez l’extrême droite et 8,53 % chez l’anti-gauche). Certes, ce résultat correspond au profil affiché du compte @9, mais rien ne permettait de prévoir que les autres axes y seraient totalement absents. Étant donné le profil monolithique de @9, nous ne le ferons pas apparaître dans les tableaux de cette section, afin de ne pas les charger inutilement.

27Pour ce qui est des trois autres ensembles de tweets à comparer (voir le tableau ci-dessous, où les résultats sont présentés d’abord séparément pour le pôle positif de l’axe, puis pour le pôle négatif, suivis, dans les dernières colonnes, par le nombre total d’occurrences pour chaque catégorie de l’axe), nous constatons que ce sont les patriotes d’extrême droite qui sont les plus intéressés par le rôle d’informer des médias (43,40 %), rôle qui est le plus saillant chez les anti-gauche également (38,90 %).

Tableau 4. L’axe du faire savoir

img-4.png

28Sur l’axe du faire savoir, les deux groupes d’activistes se valent quant à la représentation qu’ils donnent des médias, car, si les patriotes d’extrême droite sont plus positifs par la proportion plus grande de verbes de parole évoqués :

« Ce que disait @BFMTV en 2016 : "Nous ne publierons plus de photographies des auteurs de tueries". Étonnant, non ? » (@3, retweet ; les italiques des tweets cités nous appartiennent)

29Ils sont également plus négatifs en parlant de désinformation et de censure :

« Plus un mot sur Penelope Fillon dans la presse... » (@3)

« Les médias cachent consciencieusement que l'#attentat déjoué à #Marseille était projeté contre #Fillon, le seul à combattre vraiment #Daesh! » (@4)

30C’est chez l’extrême droite que la censure est évoquée le plus, tandis que l’anti-gauche parle plus de mensonge, de tricherie et de manipulation (maître mot du compte @5, qui affiche d’ailleurs dès son profil sa conviction que les médias manipulent), ainsi que du fait que l’information est passée sous silence ou n’est pas relayée :

« Encore 1 preuve de manipulation médiatique dans ces élections : censure d'1 humoriste qui défend l'abstention » (@5)

« Ah ben pour le matraquage médiatique on repassera, déjà le silence assourdissant sur #MacronLeaks et #Bayrougate sont affligeants » (@5)

« Anne Hidalgo condamnée pour diffamation, information que les médias ne relayent pas » (@6)

31Par contraste avec les deux groupes d’activistes, l’étudiante @10 affiche une attitude plus favorable envers les médias, mettant l’accent sur la publication et la révélation des informations.

32Les catégories de l’axe du faire savoir renvoient à l’ensemble des actions visant à informer. Or, les acteurs médiatiques ne se limitent pas à ce type d’actions, comme les twitteurs ne manquent pas de le rappeler ; c’est ce que nous verrons dans ce qui suit.

Axe de l’agir

33Les cinq catégories de l’agir désignent précisément les actions que les médias réalisent au-delà du rôle d’information qui leur incombe. Ce sont des actions qui n’ont pas un caractère prévisible à partir du rôle des médias, des actions que l’on pourrait caractériser d’accidentelles, par contraste avec les actions essentielles relevant de l’axe précédent.

Tableau 5. L’axe de l’agir

img-5.png

34Cet axe apparait comme étant le deuxième le plus saillant pour les deux groupes d’activistes, tandis qu’il est le moins saillant chez l’étudiante. Quasiment à l’unanimité, aucune action positive n’est attribuée aux médias, qui sont accusés de : cracher sur nos policiers, se moquer ouvertement d’un handicapé, humilier, se foutre de notre gueule, chercher lâchement à abattre Fillon, soutenir un même candidat, couvrir Macron, etc. :

« Voici le quotidien de nos policiers sur lesquels les médias et la gauche crachent en permanence. » (@2, retweet)

« Jamais une présidentielle française n'a vu #médias autant soutenir 1 même candidat. Attention au piège : voter #Macron c'est voter #Hollande! » (@4)

« Etes-vous choqué par l’acharnement des médias contre Le Pen et Fillon afin de faire élire Macron ? » (@6)

35L’anti-gauche tout particulièrement accuse les acteurs médiatiques de propagande (s’adonner à la ~, déchaînement de ~, être ~iste, ~ favorable à la gauche, etc.), ainsi que de boycotter les élections, de tuer la démocratie et de confisquer les débats :

« L'Organe de propagande libé financé par vos impôts défend son poulain avec la plus parfaite mauvaise foi. Stop subventions » (@5, auto-retweet)

« Au figaro c'est le déchaînement de propagande... Ça fait un peu honte pour un grand journal » (@7)

« les gauchiasses sont les medias. ds n'importe quel media français, ils votent à 80% à gauche, ils st devenus 1 menace pour la démocratie » (@5)

36Deux autres catégories qui se manifestent plus dans les tweets des activistes anti-gauche renvoient à une évaluation des droits des médias et des obligations ou interdits : respecter, fouler, enfreindre, être responsable ; pouvoir et impunité des médias, qui leur permet par exemple d’imposer quelqu’un, etc. :

« Les médias la détruisent car ils sont partisans de gauche et sûrs de leur impunité. Lynchage Fillon com Woerth, VGE, ou autres. Crimes » (@5)

« Le Figaro prit en flagrant délit de trucage d’un sondage concernant la sortie de l’Euro. A Retweeter » (@6)

« La campagne en 4 temps _les médias imposent Juppé _surprise, le peuple élit Fillon ! _les médias salissent Fillon _les médias imposent Macron » (@7)

37Étant donné cette vision très négative de l’agir des médias, l’on pourrait s’attendre à ce que l’axe que nous avons choisi d’appeler « du subi et du ressenti » soit entièrement négatif. Or tel n’est pas le cas.  

Axe du subi et du ressenti

38L’axe du subi et du ressenti renvoie aux actions qui affectent les acteurs médiatiques, actions venant de l’extérieur de la sphère des médias, ainsi qu’au ressenti que ces actions ou une situation donnée provoquent chez les acteurs. Les cinq catégories repérées dans le corpus pour cet axe se présentent à la fois sous un aspect positif (favorable ou valorisant pour l’acteur médiatique) et sous un aspect négatif, ce dernier étant, de nouveau, plus répandu dans les tweets.

Tableau 6. L’axe du subi

img-6.png

39Le subi-ressenti est l’axe le plus saillant dans le sous-corpus de l’étudiante (31,57 %) et arrive en dernier dans les sous-corpus militants. Une première catégorie concerne l’action du public qui suit, lit, regarde les médias ou ne les suit pas ; c’est la seule catégorie pour cet axe où l’on voit une attitude plutôt favorable des twitteurs, qui renvoie à la réception (les médias sont suivis par les dix internautes, même si par ailleurs ils peuvent être dénigrés par ceux-ci) :

« Ce soir, pour #LeGrandDebat, boycottez BFMTV ! Regardez @CNEWS ️Tweetez #boycottBFM : faisons chuter leur PDA ! » (@5, retweet)

40La deuxième catégorie renvoie à des actions qui sont orientées vers les acteurs médiatiques et qui les affectent ; ces actions subies par les acteurs médiatiques sont majoritairement négatives : ils sont agressés (surtout selon la vision de l’extrême droite), on les évite et on ne répond pas à leurs questions (selon la vision de l’anti-gauche), on les accuse et on dépose plainte contre eux (chez l’anti-gauche), on les vire (anti-gauche) :

« Rome / Italie : une journaliste attaquee par des migrants en plein direct » (@3)

« Un internaute piège les médias avec une fausse bande-annonce du prochain “Assassin’s Creed” » (@1, titre dans Le Monde)

« #Bayrou refuse de répondre aux journalistes sur l'affaire Ferrand alors qu'il présente projet #MoralisationViePublique » (@8)

41Les acteurs médiatiques manquent de liberté, aspect qui intéresse surtout l’anti-gauche : la presse est muselée, censurée, contrainte, sous pression :

« La mise en place de la dictature commence par le muselage de la presse par les intitutions de l'état » (@5, retweet)

« Censure: Eric Brunet contraint de retirer une vidéo critique envers Macron après intervention d’un patron de presse » (@6)

42Ces actions négatives subies par les agents médiatiques ont comme effet d’attirer parfois la compassion (dans le sous-corpus d’extrême droite et chez l’étudiante) et surtout de douter de la qualité et du professionnalisme des acteurs (dans le sous-corpus de l’anti-gauche). Ce dernier aspect est également visé par la catégorie « décrédibilisés », qui se manifeste chez les dix utilisateurs Twitter :

« UK: Panique au Parlement, le peuple ne croit plus les medias!!! » (@3)

« Faites-vous confiance aux #journalistes, qui, tel @samuellaurent, traquent les "#FakeNews", tout en mentant en permanence? » (@4)

43Quant au ressenti, c’est l’anti-gauche et tout particulièrement @5 qui attribuent des sentiments négatifs aux acteurs médiatiques : s’énerver, fâché, être dépité, effarouchés, ne pas s’en remettre, choqués, regretter, s’étonner, paniquer, avoir les chocottes :

« Depuis le début, @FrancoisFillon s'adresse aux Français sans se soumettre à la tyrannie médiatique. Celle-ci ne s'en remet pas. Et alors ? » (@5, retweet)

44L’extrême droite, et dans une moindre mesure l’anti-gauche, évoquent également, outrés, les réductions d’impôt et subventions dont bénéficient les acteurs médiatiques (en proportion respectivement de 3,30 % et de 1,12 %) ; nous les mentionnons en marge des catégories de l’axe subi-ressenti, car bien que favorables pour les médias, ces actions sont vues comme négatives par les dix twitteurs.

Axe de l’être

45Enfin, le dernier axe identifié se rapporte aux attitudes et qualités qu’on attribue aux acteurs des médias, qui équivalent en fin de compte à des jugements de valeur, que l’évaluation se fasse en termes de moral/immoral, intelligent/inintelligent, favorable/défavorable, etc.

Tableau 7. L’axe de l’être

img-7.png

46L’évaluation positive n’est pas totalement absente (honnête, excellente, remarquable, admirable, avoir de la gueule, faire le sel de), mais elle est négligeable :

« Merci ! Enfin un journaliste honnête dans ce pays ! » (@2, retweet)

« Excellente @jwaintraub sur l'affaire #Ferrand en ce moment sur @BFMTV » (@8, retweet)

47Les acteurs médiatiques sont surtout évalués négativement, y compris par l’étudiante, qui a pourtant une attitude plus favorable dans les axes du faire savoir et du subi. Tous comptes Twitter confondus, les évaluations négatives les plus fréquentes relèvent du champ de l’ordurier (14 occurrences), présent surtout chez @5, du champ de la corruption (12 occurrences), de la bêtise (6), de l’indifférence (5), de la haine (5), de la folie (3), de la fatigue (3). À cette liste s’ajoute le champ de la complicité, évoqué tellement souvent par les militants anti-gauche (46 occurrences, dont 31 chez @5), que nous en avons fait une catégorie à part :

« Cette ordure de "journaliste" avait déjà été utilisé pour déstabiliser Margareth Thatcher » (@4)

 « Sans complexe, les journalistes se mettent à féliciter les ministres nommés. » (@2)

 « Que les journalistes bobos de gauche arrêtent de comparer Macron à Louis XIV. » (@6)

48La catégorie « de gauche » apparaît surtout chez @5, militant anti-gauche, qui est également celui qui fait appel le plus souvent à l’invective, utilisant entre autres les mots « journaleux » et « merdias » :

« les #merdias ont lâchement abandonné Hamon, ayant fait leur choix très tôt » (@5)

« Petit traité de manipulation ordinaire : un journaleux affirme avoir des discussions qui n'existent que ds son esprit..pour me citer ensuite » (@5)

49Globalement, c’est l’anti-gauche qui porte le jugement de valeur le plus défavorable sur les médias, mais l’image que s’en font les activistes patriotes et l’étudiante n’est guère meilleure.

50En identifiant les axes et catégories ci-dessus, un certain nombre de tweets isolés ont été classés dans la catégorie « divers », qui ne présente pas d’intérêt particulier pour notre analyse, mais dont les proportions peuvent être assez importantes : 5,49 % pour les patriotes d’extrême droite, 7,27 % chez les opposants à la gauche, 15,79 % chez l’étudiante. Chez cette dernière, il s’agit souvent de tweets ironiques, humoristiques, notamment de telle chaîne de télévision qui devrait lui rembourser sa redevance TV, d’un journaliste qui change d’avis, du Canard enchaîné qui « débarque » dans la journée de Fillon, etc.

51
Pour conclure sur les représentations des médias qui se dégagent de nos quatre sous-corpus de tweets, prenons chaque sous-ensemble séparément. Nous avons vu que le compte @9, dédié à la véridicité des informations publiées dans la presse à propos de La France insoumise, présente les médias uniquement dans leur dimension informative et sous un angle largement négatif (77,78 %). Les tweets des deux camps militants, quant à eux, laissent voir des représentations rapprochées, qui présentent les médias dans leur fonction principale d’informer (axe du faire savoir, 43,40 % chez les patriotes et 37,90 % chez les anti-gauche), entachée cependant par la désinformation, la censure, le faux, le silence, l’étouffement des affaires. On considère que les acteurs médiatiques ont des actions critiquables et condamnables (axe de l’agir, respectivement 17,58 % et 23,35 %), les attitudes qui sont données comme leur étant caractéristiques sont également très largement négatives (axe de l’être, 15,94 % et 19,01 %). Les médias sont affectés de manière généralement défavorable par les actions que les autres exercent sur eux et qu’ils subissent (10,99 % et 9,93 %, axe du subi et du ressenti). Des deux camps d’activistes, c’est l’anti-gauche qui donne l’image la plus négative des médias, effet qui est dû en partie à la présence dans ce sous-corpus de @5, qui est particulièrement critique envers des médias, écrivant les tweets les plus injurieux à l’adresse des acteurs médiatiques. Enfin, le quatrième sous-ensemble de tweets est issu du compte d’une étudiante qui donne une image différente des médias. Pour sa part, elle met en avant ce que les acteurs médiatiques subissent, ce qui les affecte (31,57 %), montrant de la compassion plutôt que du mépris. Le rôle d’informer est tout aussi important (28,95 %), et les médias sont vus comme remplissant leur rôle plutôt que comme s’y dérobant. Viennent ensuite, par ordre d’importance, les attitudes, toutes négatives (15,97 %), aspect pour lequel l’étudiante ne se démarque donc pas des militants. Dans ce sous-ensemble de tweets, les acteurs médiatiques sont moins condamnés pour leurs actions (10,52 %) que chez les activistes. Ainsi, l’étudiante se représente les médias de manière plus équilibrée, même si cette représentation reste très empreinte de jugements de valeurs négatifs. Globalement, la vision qui est donnée des médias dans le corpus est une vision où le rôle d’informer des médias n’est pas vraiment rempli, où leurs actions sont totalement condamnables, leurs attitudes caractéristiques très largement négatives et lorsqu’ils sont visés eux-mêmes par des actions venant de l’extérieur, ils sont généralement désavantagés. Un sombre tableau, mais qui ne va toutefois pas jusqu’à nier le fait que les médias transmettent bien des informations et qu’il y a bien un suivi du public. Bien que très critiques à l’adresse des médias traditionnels, les dix twitteurs évoquent souvent dans leurs tweets leur rapport à ces médias. C’est cette interaction que nous allons regarder de plus près dans la troisième partie de l’analyse.

L’interaction avec les médias traditionnels

52Après avoir identifié les acteurs médiatiques mentionnés privilégiés par les dix twitteurs et après avoir vu ce qui est dit dans les tweets par rapport à ces acteurs, nous allons explorer les 1 016 tweets de notre corpus pour voir si les twitteurs mettent des mots sur l’interaction entre médias sociaux et médias traditionnels et, si tel est le cas, pour voir ce qui est montré de cette interaction.

53À cette étape, nous retenons donc les tweets qui font référence de manière explicite – et plus rarement implicite – aux utilisateurs Twitter eux-mêmes, tout en les montrant en interaction avec les acteurs médiatiques. Le repérage de ces tweets passe principalement par les expressions qui réfèrent aux utilisateurs Twitter : les pronoms personnels, le pronom on, les identifiants Twitter, ou encore des syntagmes nominaux. Par sa nature, une interaction peut être soit symétrique, avec action réciproque des deux camps médiatiques l’un sur l’autre, soit asymétrique, avec action orienté d’un camp vers l’autre. Dans ce qui suit, nous chercherons à montrer de quelle manière l’interaction est envisagée le plus souvent, à savoir ce que font les activistes Twitter et ce que font les acteurs médiatiques dans cette interaction. Il sera également intéressant de voir si les dix twitteurs parlent du fait qu’ils sont eux-mêmes cités par les médias traditionnels.

54Sur les 1 016 tweets du corpus, 62 soit 6,10 % renvoient à une interaction entre leurs auteurs et les acteurs médiatiques. Il faut remarquer que les tweets mentionnant de manière plus large la relation entre internautes et médias sont plus nombreux, mais nous avons choisi de ne garder que les tweets qui font référence aux auteurs des tweets eux-mêmes.

55Les relations de type symétrique, bien que peu attendues, ne sont pas totalement absentes. Nous en repérons trois : un emploi ironique de « nos amis journalistes » ; une comparaison du type « comme beaucoup de journalistes, nous aussi on (…) » ; et la coprésence à une manifestation. Nous repérons également la relation de possession exprimée par « nos médias ». Ces relations ne sont toutefois pas les plus intéressantes, dans la mesure où elles sont peu représentatives de l’interaction entre les dix utilisateurs Twitter et les médias traditionnels. Quant aux relations asymétriques, nous constatons qu’elles sont le plus souvent orientées vers les acteurs médiatiques et que lorsqu’elles sont orientées vers les auteurs des tweets, elles leur sont généralement défavorables. Concrètement, il s’agit des relations suivantes, qui se recoupent avec certaines des catégories de la section précédente :

  • l’interaction se situe au niveau de la simple réception : les twitteurs du corpus regardent telle chaîne de télévision ou au contraire refusent de regarder telle émission, ils sont suivis par les journalistes, ils répondent à un sondage de telle chaîne de télévision (5 occurrences) :

« Je ne regarde pas #EnvoyeSpecial car je refuse de participer à cette chasse à l'homme. » (@10) 

« Je regarde Antenne 2 sur mon PC, ca fait 1 heure que le nom de Marine le Pen n'a pas ete prononce ! » (@3)

  • l’interaction évoquée relève du partage de l’information : les twitteurs partagent une information issue des médias traditionnels ou les touchant, à savoir, ils diffusent ce qui est arrivé à un journaliste, ils retweetent un article, ils publient un tweet sur un journaliste, ils ajoutent une vidéo à propos d’un acteur médiatique (6 occurrences) :

« Je ne peux pas RT l'article normal? » (@5)

« Alerte rouge! #LCI vient de supprimer un #replay où #Macron se fait lyncher par un commentateur. Le voici: à voir et a diffuser largement! » (@4)

  • l’interaction consiste dans le fait que les médias parlent des twitteurs et de leurs publications: un article mentionne le nom du twitteur, la pétition lancée par un twitteur est citée par la presse, la vidéo d’un twitteur est publiée chez les Décodeurs, un journal donne la parole aux twitteurs français, un journaliste parle de la ligne éditoriale du twitteur, un journal dit que le twitteur désinforme, ou encore aucun journaliste ne parle des nouvelles dévoilées par le twitteurs (7 occurrences) :

« celui là a fait fort il parle de ma "ligne éditoriale" en général  » (@10)

« Pour avoir critiqué Hollande, Taubira, Belkhacem etc. Le Monde dit que nous "désinformons". A Retweeter » (@6)

  • lorsque ce type d’interaction est présenté depuis la perspective du twitteur, celui-ci affiche dans ses tweets qu’il se retrouve dans tel journal, qu’il a eu droit à un article, qu’il est à l’origine d’un article, qu’il fait le buzz, ou simplement qu’il est suivi par les journalistes (5 occurrences) :

« Nous avions dévoilé ces "nouvelles" il y a 3 mois. Je suis suivi par d dizaines de journalistes aucun n'en a parlé... protéger le chouchou ? »   (@7)

56En accord avec les résultats de l’étape d’analyse précédente, les relations évoquées dans le corpus apparaissent comme étant tendues. Cependant, ce constat est à nuancer, car si l’on regarde les quatre premières formes d’interaction énumérées plus haut (renvoyant à la réception, au partage de l’information, et au fait que les médias parlent des twitteurs eux-mêmes), sur les 23 occurrences qu’elles regroupent, seules 4 représentent des relations défavorables pour l’un ou l’autre des camps. Certes, les twitteurs évoquent le manque de confiance, les attentes déçues et le désamour vis-à-vis des médias, certes, ils donnent une vision très négative des actions des médias, mais leurs tweets montrent aussi des formes d’interactions plus neutres, notamment au niveau de la réception et du partage de l’information, voire parfois positives, dans la mesure où parfois les twitteurs activistes affichent un certain plaisir à se retrouver dans les médias :

« Un très bon article, qui mentionne la @1 » (@1, retweet)

« Dead je me retrouve dans le 20minutes avec toutes ces bêtises. Retrouvez moi demain sur le plateau de TF1. » (@10)

Conclusion

57Bien entendu, on ne saurait généraliser les résultats de cette étude à la totalité des utilisateurs Twitter, ni même à l’ensemble des utilisateurs préoccupés par la politique. Le corpus de tweets analysé dans cet article nous a permis néanmoins de mettre en évidence certains aspects du comportement de dix utilisateurs Twitter s’intéressant à l’actualité politique lorsque ceux-ci se rapportent aux médias traditionnels. Nous avons inscrit ce comportement dans un phénomène plus large, lié à l’interaction entre médias traditionnels et médias sociaux. Ce phénomène renvoie au fait qu’il y a une forme de dialogue entre les deux types de médias (traditionnels et sociaux) qui passe par la citation, la mention, la prise de position et l’évaluation des médias de l’autre type : les médias traditionnels font ainsi mention des médias sociaux, qui, à leur tour, parlent des médias traditionnels.  

58Dans cet article, nous nous sommes donc concentrées sur cette interaction depuis la perspective de dix utilisateurs Twitter, avec l’objectif de caractériser les tweets constituant ce corpus du point de vue du rapport qui y est affiché vis-à-vis des médias traditionnels. Les résultats obtenus montrent quels sont les acteurs médiatiques les plus fréquentés par les dix twitteurs et quelle est la variété des acteurs mentionnés dans leurs tweets. Nous avons constaté, ainsi, que la presse écrite et la télévision sont évoquées le plus souvent, tandis que la radio est peu mentionnée. Les discours autour des médias traditionnels font amplement appel à l’emploi générique, tels « les journalistes » et « les médias » en général, menant ainsi à des représentations fortement stéréotypées de ces acteurs médiatiques. L’image que les dix twitteurs donnent des médias est sombre, comme l’ont montré les catégories des quatre axes du faire savoir, de l’agir, du subi et de l’être. Conformément à notre hypothèse, le rôle principal associé aux médias est celui d’informer, mais les activistes Twitter évoquent aussi d’autres actions des médias qui débordent de leur rôle d’informer, des actions qui sont quasiment toutes négatives.

59L’image sombre des médias chez les activistes Twitter peut être expliquée au moins par deux faits. D’abord, le besoin de discussion autour des médias devient probablement plus urgent dès que les activistes/militants éprouvent une gêne face aux actions des médias. Les rapports aux médias traditionnels les moins négativement connotés apparaissent dans les tweets où les activistes évoquent, parfois avec satisfaction, le rôle des médias comme sources d’information. Deuxièmement, le mécontentement des dix utilisateurs Twitter vis-à-vis des médias est présent de manière inégale chez les différents groupes composant notre corpus. Les groupes dont l’attitude envers les médias est la plus négative sont les militants, aussi bien ceux d’extrême droite que ceux opposés à la gauche. Une investigation complémentaire à partir d’un corpus plus étendu serait ici nécessaire, mais notre investigation va dans le même sens que les résultats obtenus dans des études antérieures, selon lesquelles les partisans de l’extrême droite se méfient souvent des médias traditionnels (voir par ex. Broersma et Graham, 2012) et s’appuient plutôt sur les médias sociaux (voir par ex. Vergeer et Hermans, 2013) ; elle les élargit en même temps, puisque les activistes anti-gauche font montre, eux aussi, d’une attitude de dénigrement envers les médias.

60L’interaction entre les médias traditionnels et les médias sociaux peut, dans le meilleur des cas, enrichir le traitement des sujets d’actualité dans les deux camps et accroître la diversité des voix dans ce traitement (cf. Broersma et Graham, 2013 ; Hermida, Lewis et Zamith, 2014). Cependant, l’attitude plutôt négative de certains groupes d’utilisateurs Twitter envers les médias traditionnels, telle que démontrée dans la présente étude, peut ajouter à la polarisation de nos sociétés par une ségrégation accrue des communautés discursives (cf. Flaxman, Goel & Rao, 2016). Nous avons donc besoin de recherches supplémentaires pour mieux comprendre les mécanismes de l’interaction entre les médias traditionnels et les médias sociaux et ses conséquences, notamment depuis la perspective des utilisateurs des médias sociaux.

Bibliographie

Ahn, H. et Park, H.-H. (2015). The structural effects of sharing function on Twitter networks: Focusing on the retweet function. Journal of Information Science,  41 (3), 354-365. https://doi.org/10.1177/0165551515574974

Ali Bouacha, M. (1993). Énonciation, argumentation et discours : le cas de la généralisation. Semen, 8, 41-62. http://journals.openedition.org/semen/3985

Ausserhofer, J. et Maireder, A. (2013). National politics on Twitter. Information, Communication & Society, 16 (3), 291-314. https://doi.org/10.1080/1369118X.2012.756050

Bane, K. C. (2017). Tweeting the agenda: How print and alternative web-only news organizations use Twitter as a source. Journalism Practice. https://doi.org/10.1080/17512786.2017.1413587

Bastos, M. T., Raimundo, R. L. G. et Travitzki, R. (2013). Gatekeeping Twitter: Message diffusion in political hashtags. Media, Culture & Society, 35 (2), 260-270. https://doi.org/10.1177/0163443712467594

boyd, d., Golder, S. et Lotan, G. (2010, janvier). Tweet, tweet, retweet: Conversational aspects of retweeting on Twitter. Communication présentée à la 43rd Hawaii International Conference on System Sciences (HICSS-43), Honolulu, Hawaii. IEEE: Kauai. https://doi.org/10.1109/HICSS.2010.412

Broersma, M. et Graham, T. (2012). Social media as beat: Tweets as a news source during the 2010 British and Dutch elections. Journalism Practice, 6 (3), 403-419. https://doi.org/10.1080/17512786.2012.663626

Broersma, M. et Graham, T. (2013). Twitter as a news source: How Dutch and British newspapers used tweets in their news coverage, 2007–2011. Journalism Practice, 7 (4), 446-464. https://doi.org/10.1080/17512786.2013.802481

Chadwick, A., 2013. The Hybrid Media System: Politics and Power. Oxford, GB : Oxford University Press.

Chorley, M. J. et Mottershead, G. (2016). Are you talking to me? An analysis of journalism conversation on social media. Journalism Practice, 10 (7), 856-867. https://doi.org/10.1080/17512786.2016.1166978

Conway, B.A., Kenski, K. et Wang, D. (2015). The Rise of Twitter in the Political Campaign: Searching for Intermedia Agenda-Setting Effects in the Presidential Primary. Journal of Computer-Mediated Communication, 20 (4), 363–380. https://doi.org/10.1111/jcc4.12124

Flaxman, S., Goel, S. et Rao, J.M. (2016). Filter Bubbles, Echo Chambers, and Online News Consumption. Public Opinion Quarterly, 80, 298–320. https://doi.org/10.1093/poq/nfw006  

Harrington, S. (2013). Tweeting about the telly: Live TV, audiences, and social media. Dans Weller, K., Bruns, A., Burgess, J., Mahrt, M. et Puschmann, C. (dir.), Twitter and Society. New York, New York : Peter Lang, 237-248.

Hermida, A. (2010). Twittering the news: The emergence of ambient journalism. Journalism Practice, 4 (3), 297-308. https://doi.org/10.1080/17512781003640703

Hermida, A. (2013). #Journalism: Reconfiguring journalism research about Twitter, one tweet at a time. Digital Journalism, 1 (3), 295-313. https://doi.org/10.1080/21670811.2013.808456

Hermida, A., Lewis, S.C. et Zamith, R. (2014). Sourcing the Arab spring: A case study of Andy Carvin’s sources during the Tunisian and Egyptian Revolutions. Journal of Computer-Mediated Communication, 19 (3), 479–499. https://doi.org/10.1111/jcc4.12074

Jungherr, A., Schoen, H. et Jürgens, P. (2016). The Mediation of Politics through Twitter: An Analysis of Messages posted during the Campaign for the German Federal Election 2013. Journal of Computer-Mediated Communication, 21 (1), 50–68. https://doi.org/10.1111/jcc4.12143

Larsson, A. O., Kalsnes, B. et Christensen, C. (2017). Elite interaction : Public service broadcasters’ use of Twitter during national elections in Norway and Sweden.Journalism Practice, 11 (9), 1137-1157. https://doi.org/10.1080/17512786.2016.1234943

Marwick, A. E. et boyd, d. (2011). I tweet honestly, I tweet passionately: Twitter users, context collapse, and the imagined audience. New media & society, 13 (1), 114-133. https://doi.org/10.1177/1461444810365313

Mercier, A. (2018). Hashtags: tactiques de partages et de commentaires d’informations. Dans Mercier, A. et Pignard-Cheynel, N. (dir.), #info. Commenter et partager l’actualité sur Twitter et Facebook. Paris : Editions de la Maison des sciences de l’homme, 87-129.

Neuberger, C., vom Hofe, H. J. et Nuernbergk, J. (2013). The use of Twitter by professional journalists: Results of a newsroom survey in Germany. Dans Weller, K., Bruns, A., Burgess, J., Mahrt, M. et Puschmann, C. (dir.), Twitter and Society. New York, New York : Peter Lang, 345-357.

Papacharissi, Z. (2015). Affective publics and structures of storytelling: sentiment, events and mediality, Information, Communication & Society, 19 (3), 307-324. https://doi.org/10.1080/1369118X.2015.1109697

Paulussen, S. et Harder, R. A. (2014). Social media references in newspapers: Facebook, Twitter and YouTube as sources in newspaper journalism. Journalism Practice, 8 (5), 542-551. https://doi.org/10.1080/17512786.2014.894327

Pignard-Cheynel, N. et Sebbah, B. (2012). La presse quotidienne régionale sur les réseaux sociaux : Étude de la présence des titres français sur Facebook et Twitter. Sciences de la Société, 84-85, 171-191. Récupéré de http://journals.openedition.org/sds/1919

Scott, K. (2015). The pragmatics of hashtags: Inference and conversational style on Twitter. Journal of Pragmatics, 81, 8-20. https://doi.org/10.1016/j.pragma.2015.03.015

Toullec, B. et Simon, J. (2018). Quand les tweets avec images renouvellent le partage d’informations. Dans Mercier, A. et Pignard-Cheynel, N. (dir.), #info. Commenter et partager l’actualité sur Twitter et Facebook. Paris : Éditions de la Maison des sciences de l’homme, 131-168.

Weller, K., Bruns, A., Burgess, J., Mahrt, M. et Puschmann, C. (dir.) (2014). Twitter and Society. New York, New York : Peter Lang.

Vergeer, M. et Hermans, L. (2013). Campaigning on Twitter: Microblogging and Online Social Networking as Campaign Tools in the 2010 General Elections in the Netherlands. Journal of Computer-Mediated Communication, 18 (4), 399–419. https://doi.org/10.1111/jcc4.12023.

Zappavigna, M. (2012). Discourse of Twitter and social media: How we use language to create affiliation on the web. London, GB : Continuum.

Zhao, W. X., Jing, J., Jianshu, W., Jing, H., Ee-Peng, L., Hongfei, Y. et Xiaoming, L. (2011). Comparing Twitter and traditional media using topic models. Dans Clough, P., Foley, C., Gurrin, C., Jones, G., Kraaij, W., Lee, H., Murdock, V. (dir.), Advances in Information Retrieval: 33rd European Conference on IR Research. Berlin, Allemagne : Springer Verlag, 338-349.

Notes

1  Le recueil a été réalisé à l’automne 2017 par Kim Lehtonen, en tant qu’étudiant-stagiaire, à qui nous tenons à adresser ici nos remerciements.

2  Par souci du respect des données personnelles, nous remplaçons les identifiants des comptes Twitter par @1, @2, etc.

3  Étant donné le nombre très réduit de tweets publiés sur ce compte, nous ne pouvons pas citer d’exemples, car ils permettraient de remonter à l’identité du compte.

To quote this document

Ana-Maria Cozma et Milla Luodonpää-Manni, «« Des journalistes francais dénoncer la propagande, lol. » : représentations des médias traditionnels véhiculées sur Twitter par des usagers s’intéressant à l’actualité politique», French Journal For Media Research [online], Browse this journal/Dans cette revue, 10/2018 Le web 2.0 : lieux de perception des transformations des sociétés, Varia, last update the : 25/06/2018, URL : http://frenchjournalformediaresearch.com/lodel-1.0/main/index.php?id=1666.

Quelques mots à propos de :  Ana-Maria Cozma

Maître de Conférences
Université de Turku, Finlande
anacoz@utu.fi

Quelques mots à propos de :  Milla Luodonpää-Manni

Chercheuse postdoctorat
Université de Turku, Finlande
mikalu@utu.fi

 

 

Licence Creative Commons
Ce(tte) œuvre est mise à disposition selon les termes de la Licence Creative Commons Attribution 4.0 International.